15 janvier > Roman France

Olivier Charneux- Photo J.-F. PAGA/GRASSET

En ce temps-là, on mourrait à 30 ans. C’était une sale époque pour en avoir 20. Une sale époque pour vouloir tout étreindre, tout connaître, l’éblouissement du désir, la beauté de la vie, la disparition progressive des ombres de l’enfance. Olivier Charneux, né en 1963, était de ceux-là. De ces jeunes gens qui eurent l’intranquillité, la peur et le chagrin en partage. De ces garçons qui en aimèrent d’autres et ne comprirent pas tout de suite que l’heure était de nouveau à la nuit. Aujourd’hui, dans Tant que je serai en vie, un court volume, glaçant, endeuillé, l’auteur de L’enfant de la pluie (Seuil, 1999) et de Nous vivons des vies héroïques (Stock, 2007), se retourne vers ces temps d’orages immobiles. Autobiographe sensible, il le fait en égrenant année après année les œuvres et les artistes qui l’aidèrent alors, voire lui apprirent, lui comme tous ceux de sa génération, à vivre et à mourir. Tout commence donc un jour de 1981, à l’Odéon (tant il est vrai que le théâtre sera toujours pour Olivier Charneux, disciple de Michel Vinaver, le lieu même de la révélation), où Roger Planchon monte Athalie. Tout s’achèvera trente ans plus tard, dans l’hiver berlinois, à l’emplacement du Mémorial aux victimes de la Shoah conçu par l’architecte américain Peter Eisenman. Entre-temps, comme autant d’épiphanies singulières, il y aura eu un concert de Barbara, « la » Duras, Hervé Guibert, Nan Goldin, New Order, le Dead man de Jarmusch ou Les nuits fauves de Cyril Collard (entre autres choses). Et pour paraphraser Serge Daney (qui parcourt aussi ces pages), c’est moins le jeune Charneux qui regarde, s’émeut ou s’exaspère devant ces œuvres qu’il n’est, en fait, « regardé » par elles. Et ce qu’elles voient, ce qu’elles révèlent de sa fragilité et de son courage, est inoubliable. Même dans les jardins de pierre où reposent les amis que vent emporte… Olivier Mony

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