DISPARITION

Anthony Rowley- Photo DR/ODILE JACOB

Pour le monde de l'édition d'histoire et de documents, et pour Fayard en particulier, la disparition brutale d'Anthony Rowley est un choc. Mort le 26 octobre dernier d'une crise cardiaque à l'âge de 59 ans, Anthony Rowley a été un des piliers de Perrin avant de devenir directeur éditorial chez Fayard en janvier 2010. "Il a débarqué dans une maison qui lui était étrangère, avec le dynamisme qui lui était coutumier, témoigne Olivier Nora, P-DG de Fayard. En dix-huit mois, il a séduit et, au-delà, rassuré tout le monde. Le choc est extrêmement brutal, car c'était une personnalité très forte qui a marqué la maison de son empreinte, très vite et très puissamment. »

Les hommages se succèdent pour saluer l'éditeur à l'immense culture, l'historien reconnu, le gastronome érudit... Ce "colosse » (près de 2 mètres), ce "dandy épicurien », entré dans l'édition chez Calmann-Lévy, a rejoint son ami Olivier Orban chez Plon en 1992 puis a suivi Xavier de Bartillat dans l'aventure de Perrin en 1995. Avec lui, il a réveillé la maison, attirant des historiens et essayistes issus pour bon nombre de Sciences Po Paris, où il était maître de conférences. Contributeur régulier à Marianne et au guide Gault & Millau, il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Histoire générale du XXe siècle en 4 volumes (avec Bernard Droz, Seuil, 1986-1992), Histoire du continent européen, de 1850 à la fin du XXe siècle (avec Jean-Michel Gaillard, Seuil, 1998), Une histoire mondiale de la table (Odile Jacob, 2006), Et si on refaisait l'histoire ? (avec Fabrice d'Almeida, Odile Jacob, 2009)... Il a aussi dirigé le Dictionnaire d'histoire de France Perrin (2006).

"Anthony Rowley, je n'ai pas peur de le dire, pensait l'édition autrement, témoigne l'historien Christophe Ingrao sur le site Slate.fr le 27 octobre. Il avait coalisé, d'abord chez Perrin, ensuite chez Fayard, une armée d'historiens - mais pas seulement - dont la marque de fabrique était de combiner science, conscience, et transmission ; de concilier le souci de l'objet, celui du discours et celui des lecteurs. » Michel Winock, Jean-Pierre Azéma, Jean-Chrisian Petitfils, Fabrice d'Almeida, Nicolas Domenach, Maurice Szafran, Jean Sévillia... Pas moins d'une vingtaine d'auteurs l'ont suivi chez Fayard, fidèles à l'éditeur et au duo qu'il formait avec son attachée de presse Marie-Laure Defretin. "Anthony, c'était une personnalité, avec un côté un peu extravagant, une espèce de géant affirmatif, avec une capacité de travail et de concentration hors normes, dit Xavier de Bartillat, aujourd'hui P-DG de Tallandier. Il est à mettre dans la catégorie des éditeurs intervenant sur les manuscrits avec jubilation. On percevait son plaisir extrême de s'attaquer à un manuscrit, d'en parler avec l'auteur, d'essayer de le pousser dans son meilleur, parfois dans ses retranchements. » Chez Fayard, évoquant "le chef d'orchestre qui veillait à ce que chacun joue sa partition au mieux, généreux à l'égard des jeunes gens qui travaillaient avec lui », Olivier Nora précise : "On ne remplace pas terme pour terme un homme de cette stature. Il va falloir recomposer les lignes, organiser les choses autrement. L'homme va terriblement manquer, l'éditeur aussi.»

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