Rentrée hiver 2019

Sapé et cravaté comme un milord, le dandy a oublié le look punk, presque grunge, de Starshooter (1977-1982), groupe de rock français « énervé » devenu culte. Kent fait semblant de se prendre au sérieux : « Mais d'où me vient donc cette richesse ? » Il faut dire que pour quelqu'un dont le vrai métier serait « dilettante », il n'a jamais cessé de bosser, passant d'un disque à une bande dessinée, d'un polar à un roman, le tout entre deux concerts.

Puisque, dans une certaine discrétion qui lui va si bien, Hervé Despesse alias Kent Hutchinson, alias Kent Cokenstock (« des erreurs de jeunesse, ces pseudonymes, reconnaît-il, même si le second est mon nom d'auteur-compositeur pour la Sacem »), continue depuis 1982 sa carrière en solo. La grande illusion, son dix-septième album, est sorti en 2017. « Je n'arrive pas à tenir en place et j'ai un goût pour l'aventure », confie-
t-il. Cela explique à la fois son hyperactivité, son éclectisme et tous ses voyages. Ses tournées, notamment en Afrique australe, dans des conditions improvisées, approximatives, le réjouissent encore. Comme tous ces moments où, simplement, il avait besoin de prendre la tangente, de partir se ressourcer. S'enrichir, se nourrir, dit-il.

 

Karen, la star du street art

C'est ce qu'il fait en 1982, après la dissolution de Starshooter, sur un coup d'éclat. « On était fatigués, on avait tout donné, raconte Kent. Et notre tourneur nous propose de faire la première partie des Rolling Stones, à Gerland. J'ai refusé, et je suis parti au Cameroun dans des missions catholiques. » Une expérience dont il tirera une bande dessinée, African night flight (Humanoïdes associés, 1984), avec son complice Philippe Bernalin, dit Bergouze, pour le scénario. Car, dès ses débuts, le jeune Hervé ne voulait faire que deux choses : du rock et de la BD. Depuis, sa palette s'est élargie, mais il est resté fidèle à ses idéaux. « J'ai passé quarante ans de ma vie à faire ce que je veux. Et je peux dire merde aux Stones ! »

Son premier roman, Les nouilles froides, était un polar destiné à la collection « Sanguine », laquelle a disparu peu après. Il est finalement édité chez Séguier en 1989. Il en a commis quelques autres ensuite. Jusqu'à ce Peine perdue. « Je marche et je me raconte une histoire et je la couche sur le papier avec une grande excitation », explique-t-il.

Le point de départ de celle-ci fut la mort subite d'une de ses amies, qui l'avait profondément « perturbé », et qu'il avait remisée « dans un coin de [sa] tête ». Elle en sort aujourd'hui. Elle s'appelait Karen, star du street art, et elle s'est tuée dans un accident de voiture. C'est son mari, Vincent, qui va tenter de la raconter, tout en revisitant sa propre histoire. Comme par hasard, Vincent est musicien, et il fait partie d'un groupe de rock toujours en tournée. Dont le chanteur s'appelle...
Kevin, puisque c'est de la fiction.

Avec Kent, la musique n'est jamais très loin. D'ailleurs, c'est Erik Fitoussi, un copain d'enfance, ancien guitariste de Marie et les Garçons, un autre groupe de rock français des années 1970, devenu libraire chez Passages, à Lyon, qui lui a conseillé d'envoyer son manuscrit... au Dilettante. Il n'y a pas de hasard.

Kent
Peine perdue
Le Dilettante
Tirage: 0
Prix: 17 EURos
ISBN: 9782842639730

En dates

1957 

Naissance
d'Hervé Despesse à la Croix-Rousse, à Lyon.

1977

Crée Starshooter, publie ses premières BD dans « Métal hurlant ».

1989

« Les nouilles froides », premier roman, un polar.

1995

Victoire de la musique avec
« Juste quelqu'un de bien », chanson écrite pour
Enzo Enzo.

2017

« La grande
illusion »,
son dernier album solo à ce jour.

25.12 2018

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