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Cinq villes où il fait bon lire

Cinq villes où il fait bon lire

Tour à tour cinq experts, libraire, écrivain ou voyagiste, nous présentent, du Maroc à l'Ecosse en passant par la Catalogne, leur ville dans toutes ses dimensions littéraires, et dévoilent leurs bonnes adresses. _ par Pierre Georges

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Par Pierre Georges,
Créé le 17.07.2019 à 13h57

Et si vous passiez vos vacances dans un livre ? Découvrir ou redécouvrir des villes à travers les yeux d'auteurs qui y ont vécu et s'en sont imprégnés dans leurs œuvres, marcher dans les pas d'illustres héros de romans, découvrir des bibliothèques et des librairies mythiques ou encore rencontrer ses auteurs favoris : les raisons pour partir en voyage littéraire ne manquent pas et les itinéraires touristiques construits autour du livre et de ses acteurs connaissent de plus en plus de succès.

Alors, du Naples d'Elena et Lila, les deux amies au cœur de la fameuse saga d'Elena Ferrante, au Saint-Pétersbourg de Pouchkine et de Dostoïevski, en passant par le tumulte de Tanger, cité qui pousse les écrivains qui s'y rendent à la folie, le plus grand festival littéraire du monde en Ecosse ou encore la douceur de vivre des écrivains barcelonais, Livres Hebdo a sélectionné cinq « city-break » littéraires pour l'été.

Nous avons donné la parole à des professionnels du livre, éditeurs, libraires, écrivains, organisateurs de festival littéraires ou bien encore à des voyagistes, pour qu'ils nous donnent à voir leur ville et nous recommandent leurs adresses littéraires fétiches.

Bon voyage !

Naples : l'empreinte d'Elena Ferrante

Le succès de L'amie prodigieuse a donné de nouveaux attraits à la capitale de la Campanie. Le voyageur y parcourra les rues du Rione Luzzatti, retrouvera l'école d'Elena et Lila et visitera la librairie de la rue Mezzocannone.

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A la parution du phénomène littéraire mondial qu'est devenu L'amie prodigieuse (Gallimard), Elena Ferrante, sa mystérieuse auteure, n'aurait jamais imaginé l'impact touristique qu'auraient les quatre tomes de sa grande fresque napolitaine. Or avec une cinquantaine de traductions et pas loin d'une dizaine de millions de ventes de par le monde, Naples a acquis grâce à elle une nouvelle aura littéraire et reçoit toujours plus de « ferrantophiles » venant prolonger leur lecture.

De la même manière que les accros à la série Game of thrones se rendent en pélerinage en Islande, à Gérone ou à Dubrovnik, les fidèles d'Elena Ferrante viennent désormais jusqu'en Campanie visiter le Rione Luzzatti, petit quartier populaire isolé du centre de Naples qui, s'il n'est jamais nommé expressément, sert de décor à l'enfance d'Elena Greco et Lila Cerullo, les deux amies au cœur de la saga. Les visiteurs y retrouvent la petite bibliothèque dans laquelle les héroïnes se rendent enfants, leur école primaire, leur église. Ils se rendent aussi sur l'île d'Ischia, à la plage des Maronti, ou dans le centre de Naples, notamment dans la librairie de la rue Mezzocannone où Elena travaille lorsqu'elle est étudiante.

Se balader autour de la rue Costantinopoli

Mais Silvia Manfredo, napolitaine et éditrice chez E/O, la maison d'Elena Ferrante, tient à le rappeler : Naples n'a pas attendu Elena Ferrante pour regorger de curiosités. « Dans le centre historique, les touristes littéraires doivent avant tout se balader autour de la rue Costantinopoli, conseille-t-elle. En partant de là, ils trouveront la librairie Colonnese, rue San Pietro a Majella, la minuscule librairie Neapolis, rue San Gregorio Armeno, et enfin la merveilleuse librairie pour enfants Librido, rue Nilo. »

C'est aussi dans ce centre historique que se nichent la plupart des cafés et restaurant littéraires napolitains. De là, les visiteurs pourront se rendre à l'immanquable Bibliothèque nationale, et surtout à son étonnante section des études philosophiques, située au cœur du palais royal de Naples, Capri et le Vésuve en toile de fond.

Les adresses de Silvia Manfredo, éditrice chez E/O :

Librairies IoCiSto, librairie populaire et auto-gérée : 20, via Domenico Cimarosa, dans le quartier perché de Vomero.

Bibliothèque : Biblioteca Nazionale Vittorio Emanuele III : Palais royal de Naples, Piazza del Plebiscito.

Café et restaurant littéraire : Intra Moenia : 70, Piazza Bellini.

Edimbourg, the place to read

La capitale de l'Ecosse embaume la littérature. Grâce aux écrivains qui s'en inspirèrent, R. L. Stevenson, J. K. Rowling, Ian Rankin, et au célèbre International Book Festival, qui se tient en août.

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En Ecosse, en terminant la route des whiskies, une grande pause littéraire sera la bienvenue. Cela tombe bien, du 10 au 26 août 2019, Edimbourg accueille, comme chaque été, l'une des manifestations littéraires les plus importantes et populaires de la planète avec son International Book Festival. Autour du thème «  We Need Stories », près de mille écrivains, poètes, musiciens, journalistes ou illustrateurs se rendront cette année dans la touristique capitale écossaise.

« Le festival est bien plus qu'une série de discussions sur le livre, c'est un lieu dédié au débat public international, où les lecteurs et les auteurs viennent se rencontrer pour discuter sans filtre », explique Nick Barley, le directeur du festival. Pour lui, si la manifestation vaut à elle seule le voyage, elle sera surtout une occasion pour les amoureux du livre de découvrir plus largement Edimbourg, première ville au monde classée « Cité de la littérature » par l'Unesco, mais aussi ville d'attache et d'inspiration de Robert Louis Stevenson, Kate Atkinson, J. K. Rowling, Irvine Welsh, Ian Rankin et tant d'autres.

Là où J. K. Rowling écrivait

Du Scottish Storytelling Centre au Scottish Book Trust, en passant par la Bibliothèque nationale écossaise, le musée des écrivains, ou le monument dédié à l'écrivain Walter Scott, la capitale écossaise respire la littérature, accueillant plusieurs dizaines de maisons d'édition, et ayant même nommé sa gare d'après un roman (Waverley, de Walter Scott).« Les visiteurs doivent explorer les rues étroites et abruptes qui ont inspiréL'étrange cas du docteur Jekyll et de Mr Hyde, s'engouffrer dans le café Elephant House où J. K. Rowling a écrit les premières aventures deHarry Potter, se promener sur les traces de Miss Jean Brodie, faire une tournée des pubs littéraires ou des visites de la ville autour deTrainspottingou de Rebus, le héros de Ian Rankin, conseille Nick Barley.Les points d'eau littéraires sont innombrables », conclut-il. Cerise sur le gâteau, le salon du livre coïncide chaque année avec l'immense festival de théâtre et d'opéra EIF (Edinburgh International Festival) et, comme à Avignon, de son pendant off, The Fringe, considéré comme le plus important festival artistique du monde avec ses 3 000 spectacles chaque année.

Saint-Pétersbourg, la littérature comme un gant

Capitale de la grande Russie pendant des siècles, la ville a attiré écrivains et poètes qui espéraient s'y faire connaître. Sur leurs traces ont pris naissance des « escapades littéraires ».

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En tant que centre de l'Empire, la vie intellectuelle a toujours été intense à Saint-Pétersbourg, et il était impensable pour un écrivain de ne pas se trouver dans la capitale pour se faire connaître et espérer publier. Il y a mille angles pour découvrir la ville, celui de la littérature lui va comme un gant » , résume Frédérique Diat Misiara, responsable de la production Europe et Orient pour Les Maisons du voyage, un tour-opérateur proposant une « escapade littéraire » très poussée dans la ville des tsars.

Le programme de cette dernière permet de découvrir Saint-Pétersbourg à travers ses grands écrivains : Pouchkine et Dostoïevski, avec séjour à l'hôtel « Frères Karamazov » et visites de lieux emblématiques de la littérature russe en compagnie de guides privés spécialistes des deux écrivains.

La maison-musée Nabokov

En été de préférence, lorsque la ville ne voit presque jamais le soleil se coucher, il sera possible au visiteur de se rendre dans le musée-appartement de Pouchkine, également Institut de littérature russe, ou au musée-mémorial Dostoïevski. Les visites se poursuivront au musée d'Anna Akhmatova, à la maison-musée Nabokov et dans tous les lieux ayant inspiré les écrivains russes : des palaces mythiques comme le grand hôtel Europe, l'Astoria ou l'hôtel Angleterre, la Gostiny Dvor, fameuse galerie marchande, en passant par le marché coloré Kouznetchny ou l'étonnant immeuble Art nouveau qui abrite la grande librairie Dom knigui.

 « Il ne s'agit pas seulement des classiques mais aussi d'autres écrivains et poètes pétersbourgeois dont la vie et l'œuvre peuvent donner lieu à d'autres escapades littéraires,poursuit Frédérique Diat Misiara, qui cite pêle-mêleNicolas Gogol, en particulier avec ses incroyablesRécits de Pétersbourg, et les plus récents Andréï Biély, Vladimir Nabokov, les poètes Sergueï Essénine, Alexandre Blok, Anna Akhmatova ou encore Joseph Brodski. »

Tanger, la ville artiste

Légendaire porte de l'Orient et cité douce aux étrangers, Tanger a vu passer et séjourner un grand nombre d'écrivains. Au cœur de la ville, une librairie.

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Quelque part entre l'Europe et l'Afrique, entre l'Atlantique et la Méditerranée, mais aussi à la croisée des littératures mondiales depuis des décennies, la simple évocation de son nom suffit à Tanger pour envoûter n'importe quel voyageur. Un nom revient forcément lorsque l'on évoque la cité marocaine et sa dimension littéraire : celui de la mythique librairie des Colonnes, ouverte il y a soixante-dix ans par la famille belge Gerofi et toujours aussi active au cœur de la vie culturelle tangéroise.

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Le syndrome de Tanger

« La librairie est née un jour d'été 1949, quand le monde entier se donnait rendez-vous à Tanger. Elle s'est imposée depuis comme un lieu de culture, ouvert et pluriel, où les arts et les lettres se retrouvent », raconte Simon-Pierre Hamelin, son directeur depuis quinze ans, également écrivain, éditeur et directeur de la revue littéraire Nejma. « Samuel Beckett, Jean Genet, Juan Goytisolo, Tennessee Williams, Truman Capote ou Paul Morand l'ont fréquentée. Gallimard en fait l'un de ses comptoirs, Jane et Paul Bowles leur boîte aux lettres, Mohamed Choukri sa salle de lecture, Tahar Ben Jelloun sa bibliothèque, et pour tous les Tangérois et visiteurs de passage, elle devient un refuge de l'esprit », ajoute-t-il.

Et ils sont nombreux, les visiteurs pour qui Tanger constitue la destination littéraire par excellence. La ville va même jusqu'à donner son nom au « syndrome de Tanger », déclenchant chez les écrivains qui s'y rendent des comportements extravagants (folie, déni de soi, invention d'une nouvelle identité, retournement de toutes les valeurs) liés aux fantasmes littéraires que la ville suscite chez eux.« Cela fait des libraires des gardiens d'un temple où l'on vénère des divinités aux langues et de civilisations différentes, observe Simon-Pierre Hamelin.La Librairie des Colonnes est une des stations principales du pèlerinage à Tanger, cité littéraire avant toute chose et comme il en reste si peu aujourd'hui. »

Les adresses de Simon-Pierre Hamelin, Librairie des Colonnes

Librairies: Librairie des Colonnes : 54 avenue Pasteur ; Librairie-galerie Les Insolites : 28 Khalid Ibn El Oualid

Centres culturels: Cinémathèque de Tanger : 3 rue de La Liberté ; Théâtre Darna (et sa troupe « Mémoires d'Avenir ») : rue de la Plage ; Centre culturel Tabadoul : rue Magellan ; Old American Legation of Tangier : 8 rue d'Amérique

Cafés et restaurants littéraires : Gran café de Paris : Place de France ; Number one : 1 Avenue Mohammed-V

Barcelone : à livre ouvert

Barcelone est accueillante, colorée, magique : c'est ce que pensent les écrivains français qui y vivent. L'un d'entre eux nous y guide.

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De Virginie Despentes à Mathias Enard, Barcelone magnétise les écrivains français contemporains. Pour le lauréat du prix Goncourt 2015, auteur de Dernière communication à la société proustienne de Barcelone (Inculte) et barcelonais depuis dix-sept ans, la cité catalane attire par son atmosphère « colorée, bordélique, bruyante ou métamorphosée ». Après sa Rue des voleurs (Actes Sud, 2012), titré en hommage à une fameuse rue de la ville, Mathias Enard a participé au Barcelone. Histoire, promenades, anthologie et dictionnaire (collection « Bouquins » chez Robert Laffont, 2018) de son ami de longue date Pierre Ducrozet.

Une cathédrale de livres

Pour ce dernier, autre auteur d'Actes Sud qui a posé ses valises en Catalogne en 2006, Barcelone, déjà surnommée « la ville des prodiges », d'après le roman d'Eduardo Mendoza, est éminemment littéraire. « Parce qu'elle a la grâce, le mystère, quelque chose dans l'air d'impalpable, d'indéfinissable, toutes choses qui la rapprochent immédiatement de la littérature », confie-t-il. « Elle est faite d'une cathédrale de livres et de romans, qui ont participé à sa création, à ce qu'elle prenne vraiment forme », poursuit Pierre Ducrozet, précisant que les romans de Marsé, Montalbán, Genet, Orwell, Mendoza ou encore Cervantès « ont donné une existence à ces rues ». Outre les innombrables décors littéraires qu'abrite la ville, Barcelone est aussi le plus grand centre de publication en espagnol, et fait partie depuis 2015 du réseau des villes créatives de l'Unesco, en tant que Ville de la littérature.

«  Cette ville possède une vraie magie. Elle est amène, accueillante, on s'y sent instinctivement bien. Il est difficile d'y être malheureux, ce qui m'arrange plutôt, s'amuse aussi Pierre Ducrozet.A Barcelone, je trouve les choses plus simples, les relations humaines chaleureuses et limpides, la lumière réconfortante, la vie douce et intense. Si la ville n'apparaît qu'en filigrane dans mes romans, sa lumière et ses couleurs les infusent, c'est certain », dit-il, précisant vouloir consacrer prochainement un roman entier à la ville.

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