En arabe, el ghorba est le soupir mélancolique de l'exil. Sans équivalent dans la langue de Molière, il est l'endroit phonétique où déracinement, violence et nostalgie s'entrelacent. Un terme dont Elsa Piacentino, Halima M'Birik et Lucie Guardos, à la tête de la librairie El Ghorba mon amour à Nanterre, lauréate du Grand Prix cette année, se sont saisies pour baptiser l'enseigne. Fondée en 2020, celle-ci s'est bâtie sur les vestiges du bidonville La Folie, qui a abrité jusque dans les années 1970 des milliers d'immigrés, maghrébins pour beaucoup d'entre eux.
Une librairie coorganisatrice d'animations et rencontres
Située à quelques encablures du quartier universitaire - là-même où Elsa Piacentino et Halima M'Birik se sont rencontrées -, la librairie est un lieu ancré dans son quartier. En témoigne son foisonnant catalogue de 12 500 références, dont un rayon fourni en jeunesse et bande dessinée, mais aussi un important étalage entièrement consacré à la « Nanterrologie », où nombre de lectures relatent l'histoire de ce berceau des luttes sociales. Grâce à la densité de son offre en sciences humaines et sociales, la librairie a également conquis les enseignants-chercheurs et les collectifs étudiants.
Mais aussi les institutions, telles que le théâtre des Amandiers, la Bibliothèque universitaire et la Société d'histoire de Nanterre ou encore la Maison de la musique, avec lesquelles elle coorganise animations et rencontres. Autant d'invitations à réunir un public pluriel dans un lieu littéraire qui se veut appartenir à tous. Et surtout aux descendants d'une histoire qui s'est écrite aux larges des deux rives de la Méditerranée.