7 janvier > Roman France

On ne sépare pas les enfants qui s’aiment. Fussent-ils frère et sœurs (jumeaux même). Fût-ce par leurs mariages respectifs. Emma et Axel Bricourt ne sont jamais restés très longtemps éloignés l’un de l’autre. Ni non plus, par la pensée au moins, de leurs parents, Stéphane, un universitaire farouchement athée et un rien cavaleur, et Laure à qui l’on vient de diagnostiquer un cancer du sein. Emma s’apprête à se marier avec David Cohen, fils de Lisa, dont la famille ashkénaze a été décimée dans les camps, et de Marc, un séfarade tunisien attaché à sa judéité. Quant à Axel, lui unit sa destinée à Philippine de Langles, fille de François et Marie-Hélène, des hobereaux catholiques marqués par la mort accidentelle quelques années auparavant de leur fils aîné. Comme Emma et Axel ont décidé de se marier de concert et que chacune des trois familles a une histoire, un vécu religieux et social tout différents, cela n’ira pas sans sacrifices, crises et petits et grands chagrins.

Ces parties de cache-cache sentimental entre tradition et émancipation, on a déjà lu et vu cela souvent. Seulement, dans son gracieux et songeur Nous sommes deux, Marianne Rubinstein, multipliant les fausses pistes avec une belle allégresse, transcende et pervertit l’argument initial et le récit de genre. Ce dont il est question ici, c’est de ce qui passe et de ce qui, décidément, ne passe pas : le temps et le passé. Sans se départir jamais de la vivacité propre à ce type de comédies, Rubinstein y introduit un élément de douceur et de tristesse qui l’apparente bien plus aux maîtres de la comédie noire new-yorkaise qu’aux romancières trop hexagonales du couple et de la midlife crisis. Tout ceci serait très drôle si ce n’était grave comme est grave l’enfance enfuie lorsque l’on ne l’a pas vu partir. O. M.

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