NUMÉRIQUE

"Nous avons obtenu ce pourquoi nous nous battions, il n'y avait plus de raison à s'obstiner dans une procédure judiciaire." HERVÉ DE LA MARTINIÈRE, LA MARTINIÈRE- Photo OLIVIER DION

Avec Google, tout se termine sinon en chanson, du moins en transaction. L'assignation pour contrefaçon engagée par La Martinière en 2006 se boucle donc par "un accord définissant contractuellement les conditions de numérisation des oeuvres indisponibles", selon un communiqué commun le 25 août. Le moteur de recherche évite la poursuite en appel du seul procès qui lui a valu une condamnation de son programme de numérisation de livres entrepris aux Etats-Unis en 2004, et qui secoue les éditeurs du monde entier. "Nous avons obtenu ce pourquoi nous nous battions, il n'y avait plus de raison à s'obstiner dans une procédure judiciaire", explique Hervé de La Martinière, P-DG du groupe. Le volet financier n'est pas précisé.

"Nous espérons toujours pouvoir proposer ce type d'accord à d'autres éditeurs dans l'avenir." PHILIPPE COLOMBET, GOOGLE- Photo PASCAL FAUTSCHI

L'éditeur "déterminera les oeuvres que Google est autorisé à numériser ou non. Les oeuvres déjà numérisées pourront être retirées des services Google, à la demande de l'éditeur", indique le communiqué. Au préalable, les deux nouveaux partenaires doivent produire des listings : des titres numérisés pour le moteur de recherche, et des ISBN des maisons du groupe pour La Martinière. La sélection de ce qui est autorisé ou non commencera avec leur rapprochement. Ensuite, "si La Martinière Groupe le souhaite, ces livres pourront être vendus sur la plateforme Google Ebooks sur la base d'un accord de partage de revenus". A la fois libraire et grossiste en livres numérisés, Google Ebooks ne fonctionne encore qu'aux Etats-Unis mais ouvrira dans le monde entier. Abrams, la filiale américaine du groupe La Martinière, discutera de ces opportunités de commercialisation avec le moteur de recherche, indique le P-DG, ajoutant que rien de tel n'est prévu pour le moment avec les maisons françaises.

Le cadre général de cet accord paraît proche de celui qui a été négocié avec Hachette, d'après ce qui a été communiqué des deux transactions. Formellement, elles donnent satisfaction aux éditeurs sur le point à l'origine du conflit : le moteur de recherche ne numérisera plus tous les ouvrages appartenant à ces deux groupes et trouvés dans les BU américaines, mais seulement les titres indisponibles pour lesquels il aura obtenu une autorisation - ce que les éditeurs américains n'ont pas obtenu.

Pas de discussions sous la menace

Mais ces accords mettent en porte-à-faux les autres représentants du livre ou de la culture en France restés sur une ligne raide à l'encontre de Google. La Société des gens de lettres (SGDL) et le Syndicat national de l'édition (SNE), qui s'étaient joints à l'action de La Martinière, doivent décider s'ils poursuivent la procédure en appel. Selon Jean-Claude Bologne, son président, la position de la SGDL dépendra du respect du droit moral des auteurs, à la base de son intervention, mais aussi du choix du SNE, qui n'a encore rien communiqué sur le sujet. Le ministère de la Culture a rappelé après chaque accord qu'il comptait bien que tous les éditeurs bénéficient des mêmes engagements, dans le cadre des négociations engagées entre Google et le SNE. Or elles sont au point mort, comme le reconnaît Philippe Colombet, le directeur de Google Livres France : "Les discussions ont bien avancé jusqu'au printemps lorsque le contexte a changé. Nous espérons toujours pouvoir proposer ce type d'accord à d'autres éditeurs dans l'avenir." Le contexte nouveau, c'est l'assignation délivrée début juin par Albin Michel, Flammarion et Gallimard. Très fâché, Google a refusé de continuer à discuter alors qu'il serait de nouveau traîné au tribunal.

26.10 2015

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