L'éditeur turc d'un roman érotique d'Apollinaire jugé et primé le même jour

Irfan Sanci et les couvertures des livres incriminés

L'éditeur turc d'un roman érotique d'Apollinaire jugé et primé le même jour

Irfan Sanci était présenté à un juge pour avoir traduit et publié en Turquie Les exploits d'un jeune Don Juan le jour où il reçoit le prix de la liberté de la publication 2010 de l'Union internationale des éditeurs.

avec yh Créé le 15.04.2015 à 20h04

L'éditeur turc Irfan Sanci, couronné le 2 novembre lors du 29e Salon du livre d'Istanbul par le prix de la liberté du publication 2010 décerné par l'Union internationale des éditeurs (UIE), était présenté le même jour à un juge de la métropole turque pour avoir traduit et publié aux éditions Sel, qu'il a fondées, Les exploits d'un jeune Don Juan.

Le roman érotique de Guillaume Apollinaire, dont la première édition remonte à 1911, n'est pas sa seule oeuvre incriminée en Turquie puisque, en février dernier, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la Turquie pour avoir poursuivi en justice l'éditeur turc des Onze mille verges, Rahmi Akdas.

« Mon pays me punit pour mon travail et en même temps, je reçois le soutien d'une organisation internationale ; c'est tragique, mais c'est la Turquie », a relevé Irfan Sanci, selon lequel « pour l'Etat, il y a des lignes rouges à ne pas franchir : les questions kurde et arménienne, la sexualité... C'est un réflexe de la bureaucratie kémaliste ».

Déjà emprisonné, après le coup d'état qui a frappé le pays, de 1971 à 1980, Irfan Sanci, qui a bénéficié du soutien de deux professeurs de littérature qui ont rédigé un rapport attestant l'appartenance d'Apollinaire au patrimoine littéraire, risque une amende et une peine de 9 ans de prison. La cour se réunira une nouvelle fois le 7 décembre.

Environ 70 éditeurs et écrivains, dont le prix Nobel de littérature 2006 Orhan Pamuk à l'encontre duquel l'accusation a toutefois été abandonnée, sont actuellement en procès en Turquie, accusés de diffamation ou d'injures à l'égard d'institutions turques, ou encore incriminés pour leurs commentaires sur le génocide des Arméniens ou la situation des Kurdes.

L'UIE a également remis un prix à Israpil Shovkhalov, éditeur en chef, et Viktor Kogan-Yasny, directeur de la publication du magazine tchétchène Dosh pour leur contribution à la défense et à la promotion de la liberté de publication.

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