11 OCTOBRE - ROMAN Mexique

Joaquín G. Casasola- Photo DR/AUTREMENT

La fréquentation du septième cercle de l'enfer permet parfois aux romanciers d'accomplir leurs humanités. Ainsi, la prose de l'Hispano-Mexicain Joaquín Guerrero Casasola serait-elle aussi allègre, gorgée d'humour et joliment speedée s'il ne l'avait depuis un quart de siècle frottée aux exigences profanes de l'écriture de scénarios pour la télévision ou du "storytelling" pour le monde politique (il fut la plume du président mexicain, Ernesto Zedillo Ponce de León) ? Casasola vient d'être enfin (impeccablement) traduit en français avec ce réjouissant Adios Mexico, qui réunit deux romans ayant tous deux pour héros le détective privé à la coule, Gil Baleares. Ancien de la police, Baleares vit avec son vieux père atteint d'Alzheimer, non loin de son ex-femme et très à côté de ses pompes. Il passe ses journées à essayer de résoudre des affaires d'enlèvement (industrie nationale au Mexique), ingurgiter des tacos et se faire corriger d'importance. Le tout sous l'oeil impavide d'une mégalopole, Mexico (qui est peut-être la vraie héroïne du livre), où la violence, la corruption, le machisme ont valeur de tables de la loi. La vie y est une farce sans doute, mais une farce macabre. Casasola semble d'ailleurs s'y sentir comme un poisson dans l'eau, réinvestissant le genre, le polar baroque, avec une énergie et une dérision très plaisantes, qui ne sont pas sans rappeler Les minutes noires de Martín Solares (Bourgois, 2009) et de façon plus métaphorique l'immense Mexico midi moins cinq de José Agustín (La Différence, 1993). Ne nous y trompons pas, la désolation, la déshumanisation, le désert spirituel des grandes métropoles sont bien au programme de ce Adios Mexico. Simplement, Casasola sait qu'il n'est pas nécessaire d'être sinistre pour traduire l'ampleur du désastre contemporain. Ce qui nous ramène, le sourire aux lèvres, au septième cercle de l'enfer.

27.10 2014

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