Du 6 au 8 juin 2011, se tenait à Monza en Italie le deuxième Forum mondial de l'UNESCO sur la culture et les industries culturelles. Au programme, des débats autour du «  futur de l'écrit ». Je vous livre quelques impressions, certes incomplètes, car je n'ai pu y rester que deux jours (voir aussi notre actualité du 7 juin ). Bien entendu, certains propos étaient convenus, attendus. Le discours de la Directrice générale de l'UNESCO, Irina Bokova, allia quelques remarques inutiles («  la lecture est un enjeu de taille  », «  le livre suscite notre imagination  » ...), et de vraies préoccupations intéressantes sur ce que pourrait être un marché du livre numérique qui permette la diffusion la plus large du savoir, l'éducation, l'expression la plus libre des auteurs, et le maintien/renforcement d'une chaine de valeur (le mot ne fut pas employé) qui demeure viable. Il ressortait quelque chose de positif de cette rencontre, notamment le sentiment de sortir d'un débat entre acteurs qui s'étaient déjà tout dit pour élargir les discussions à des participants un peu diversifiés, ne serait-ce que grâce à la présence précieuse de contributeurs venus du Nord et du Sud, des pays développés, de pays émergents, et de pays en développement. Je me suis dit que pour certains de ces pays le livre numérique conduira, sur des segments du marché tel celui de l'éducation, à sauter une étape et à investir directement dans des ressources pédagogiques numérisées. Un participant chinois indiqua que la taille du pays mène quasi naturellement à un usage du numérique comme solution pour un accès de masse à la lecture. Ce qui vaut pour la Chine peut être décliné dans d'autres pays, notamment d'Afrique, pour des raisons certes distinctes. Le deuxième axe intéressant était le fait de rassembler des acteurs du livre et de la presse et de les faire dialoguer. Les formes nouvelles de diffusion de l'écrit - les blogs par exemple - apparaissaient dans leur double visage : prolongement et complémentarité avec des formes labellisées par des entreprises ou des institutions reconnues, et mise en concurrence par des modes d'expression qui rognent sur le domaine de ces institutions et posent la question de la compétence, de l'expertise, et de la substitution du gratuit au payant. M'attendant à un propos décapant, j'allais écouter Richard Stallman, grand manitou du copyleft , qui rappela qu'au moment de la création de ce concept  (nullement antinomique du copyright) il visait la liberté d'utilisation du logiciel. Je fus déçue par sa prestation. On prenait la mesure de l'impossibilité de déduire de ce qui se passe dans le monde du logiciel un modèle possible (parmi d'autres) pour le monde du livre. Au-delà du côté showbiz attaché à la personne, qui m'apparut comme plus suffisante que nécessaire, retirant ostensiblement ses baskets à la tribune, distribuant un petit texte de peu d'intérêt, l'absence de message était évidente. Le professeur de Droit André Lucas vint en contrepoint, évoquant une crise de légitimité du droit d'auteur du fait d'une certaine forme d'indifférence devant les nouveaux usages effectifs, et de protections trop longues et trop fortes. La réponse se décline en exceptions et aménagements, au risque de réduire la lisibilité du corpus législatif. Si chacun, à fort peu d'exceptions près, s'attelait à étayer l'idée que la propriété intellectuelle demeure un pilier de l'économie de l'écrit, des réflexions étaient développées au sujet des coûts transactionnels impliqués (notamment dans le cas des œuvres orphelines). La souplesse des licences Creative commons fut évoquée, mais le respect des droits demeura un credo.  Face aux inquiétudes çà et là exprimées, Jürgen Boss, directeur de la Foire du Livre de Francfort, rappelait que l'édition numérique dans le secteur médical, c'est tout bénéfice. Alors le numérique, promesse ou cauchemar ? La balance penchait nettement du côté de la promesse.    
15.10 2013

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