Rapport d'activité

Médiateur du livre : dix ans d'évolution vers un rôle de « médiation de filière »

Rapport d'activité 2024-2025 du médiateur du livre

Médiateur du livre : dix ans d'évolution vers un rôle de « médiation de filière »

Dix années d'existence ont transformé le médiateur du livre, qui publie son rapport d'activité 2024/2025, en un forum de concertation sectorielle. Un rôle que Jean-Philippe Mochon, en poste depuis cinq ans, endosse avec pragmatisme face aux mutations d'une filière en questionnement permanent.

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Par Éric Dupuy
Créé le 24.09.2025 à 06h00

Le médiateur du livre Jean-Philippe Mochon publie ce 24 septembre son rapport d’activité 2024-2025*, marquant les dix ans de la création de cette fonction qui « a pris sa place dans l’écosystème éditorial français ». Il estime par ailleurs que l’institution s'est progressivement imposée comme une instance de concertation sectorielle au-delà même de ses missions initiales de règlement des litiges individuels.

Une médiation collective plutôt qu'individuelle

« Le médiateur est devenu une instance de médiation de filière pour travailler sur des sujets collectifs avec les organisations professionnelles », explique à Livres Hebdo Jean-Philippe Mochon. Cette fonction n'était « pas prévue au départ » dans la loi, qui privilégiait les « modalités alternatives de règlement des litiges » entre parties privées.

Concrètement, les demandes de conciliation restent rares. « Même si cela arrive, on n'est pas saisi tous les jours de demandes de conciliation dans le cadre d'un litige », reconnaît le médiateur. En revanche, plusieurs « chantiers au long cours » mobilisent l'institution, structure légère composée du médiateur, qui exerce ces fonctions en parallèle de son activité principale au Conseil d’État et d’un délégué à temps plein, David Fuks, ancien avocat et chercheur enseignant à Paris-Saclay et la Sorbonne.

L'instance a ainsi conclu deux accords sectoriels, un troisième étant en cours de discussion. Également médiateur de la musique, Jean-Philippe Mochon constate plus d’avancées sectorielles dans le monde du livre. Deux accords ont été signés par ses principaux représentants et un troisième est en cours de discussion, contre avec un seul portant sur la rémunération des musiciens du côté industrie musicale.

Code prix et occasion en chantier

Après avoir porté un accord sur les modifications de prix, signé notamment par le Syndicat national de l'édition et le Syndicat de la librairie française, mais aussi par exemple la Fnac et E.Leclerc, le médiateur travaille actuellement sur le recours au code prix, un sujet qui pose problème aux libraires.

Ces derniers dénoncent en effet l'absence de prix marqué sur certains ouvrages, principalement des BD ou issus de certains éditeurs de poche, ce qui pose problème au regard de la loi, « inhibe l'acte d'achat » et les contraint à un « travail gigantesque » d'étiquetage. Le médiateur espère conclure un accord sur le sujet d’ici la fin de l’année.

Le médiateur du livre traite aussi des sujets techniques complexes, notamment les « incertitudes sur le champ d'application de la définition fiscale du livre », alors que le serpent de mer sur la TVA du livre soulève des interrogations légitimes.

Dialogue constructif

Les « sujets de frontière » (ouvrages de coloriages pour adultes, recueils de photographies…) créent des difficultés quand « l'administration fiscale n'est pas forcément du même avis que le libraire ou l'éditeur qu'elle contrôle ». Jean-Philippe Mochon assure « suivre ce dossier depuis trois ans, en lien avec les ministères concernés » pour encourager les conditions d’un dialogue constructif avec la filière.

Sur le marché de l'occasion, sujet d'inquiétude croissante, le médiateur reste en revanche sur des compétences restreintes. Il ne traite que la « distinction des offres de livres neufs et des offres de livres d'occasion », inscrite dans la loi en 2017 sur recommandation de son prédécesseur.

Les discussions menées avec éditeurs et libraires sur l'interclassement n’ont pas trouvé de consensus. Seul résultat : l'engagement des libraires dans un cadre collectif à ne plus pratiquer les « prix du livre neuf barrés » à côté du prix d'occasion.

Sur le numérique, l'institution s'est également auto-saisie au sujet des webtoons et mangas commercialisés sous forme de jetons à prix variable, éloignant de fait la pratique sur le prix unique.

Consolidation du cadre existant plutôt qu’évolution législative

De manière globale, le médiateur constate un « quasi-consensus » autour de la loi Lang, conforté et renforcé par les récents accords sectoriels. Il privilégie la « consolidation du cadre existant » plutôt que l'évolution législative.

Ses compétences restent cependant limitées aux applications de la loi de 1981, de celle de 2011 sur le numérique et aux rapports entre édition publique et privée. « Si on me demandait par exemple aujourd'hui de rassembler les acteurs sur le livre d'occasion, ce ne serait pas simple », reconnaît-il.

L'institution attend l'issue du contentieux sur la loi Darcos devant la Cour de Justice européenne (lire ci-après), puis le Conseil d'État. En attendant, le médiateur poursuit ses « saisines possibles » et maintient sa « vigilance » sur l'évolution des pratiques commerciales.

*Retrouvez l'intégralité du rapport en document lié sur la gauche de l'article. 

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