7 janvier > Roman Grande-Bretagne

Au début, la fille est nue. Morte ou bien vive, au fond de la piscine. Quoi qu’il en soit, pas exactement le comité d’accueil que pouvaient attendre le poète Joe Jacobs et sa femme Isabel, correspondante de guerre, leur fille de 14 ans, Nina et leurs amis Mitchell et Laura en prenant possession de cette belle villa au-dessus de Nice où ils entendent passer l’été. Puis Kitty Finch, puisque tel est son nom, la vingtaine plutôt avenante donc, se prétendant botaniste, s’extrait de la piscine sous le regard admiratif du gardien hippie allemand et nettement plus dubitatif, voire inquiet, de celui de la propriétaire octogénaire des lieux. Tout ce petit monde, bien sûr, ne tardant pas à se retrouver pour des libations alcoolisées, prétextes à se dire des horreurs et à en penser de pires encore…

Qui est cette Kitty, tour à tour insupportable et irrésistible, échouée là comme un ange de la mort ? Quel est ce poème qu’elle prétend faire lire à ce Juif polonais de Jozef réinventé en Joe, poète américain ? N’est-elle pas simplement l’outil dont vont se servir de grandes personnes pour pouvoir enfin s’avouer ne plus s’aimer et s’approcher au plus près de la vérité de leurs désirs ?

Ce qu’il y a de plus impressionnant dans Sous l’eau, le premier roman traduit en français de l’Anglaise d’origine sud-africaine Deborah Levy, c’est combien son économie narrative s’adapte sans cesse au propos. Voilà un livre tout entier basé sur le mystère et sur le tremblé du réel, les zones incertaines comme celles du rivage, du petit matin, de l’adolescence, de l’âge mûr et des tragédies silencieuses qui se jouent de l’une à l’autre. Depuis Patricia Highsmith, à laquelle on ne peut que songer (ou certains livres de Ruth Rendell), était-on parvenu à une telle précision dans l’imprécision, à décrire ainsi de si merveilleux cauchemars ?… O. M.

Les dernières
actualités