3 octobre > Roman Finlande > Arto Paasilinna

Il y a, parmi les seize romans traduits en français, tous chez Denoël, du grand Arto Paasilinna, maître du farfelu à la sauce finlandaise et du vin d’airelles, des sommets : Le lièvre de Vatanen, bien sûr (1989), mais aussi et surtout Le meunier hurlant (1991) ou La douce empoisonneuse (2001). Il y eut aussi des titres plus en demi-teinte. Paasilinna, c’est le Nothomb d’Helsinki : chaque été depuis bientôt trente ans, il rend un manuscrit à son éditeur, WSOY, lequel le publie avec joie, mais ne fait pas le tri entre le bon grain et l’ivraie. C’est sa traductrice française qui s’en charge, et se fait passeuse.

Cette fois, elle a puisé dans le stock un roman de 1994, au titre alléchant. Le dentier du maréchal, madame Volotinen et autres curiosités, est d’abord l’histoire d’une rencontre improbable et fortuite, en 1963, entre Volomari Volotinen, un étudiant lapon diplômé en droit de 21 ans, qui fera carrière dans les assurances, et Laura Loponen, une boulangère-pâtissière de vingt ans son aînée, autrefois mariée avec un caporal disparu - un sale type - durant la guerre, en 1942, l’année de naissance de Volotinen.

A priori, tout les sépare, et d’aucuns en font déjà des gorges chaudes. Mais, de leur mariage, en 1965, à la mort prématurée de Laura, en 1974, d’une crise cardiaque, ils vont vivre une sorte d’amour, rythmé par des aventures et des voyages assez délirants (pour lui) et entretenu par leur passion commune, compulsive et extravagante, pour les antiquités, de préférence répugnantes, encombrantes, mais historiques. Comme le fameux dentier du maréchal Mannerheim - tout le monde, dans cette histoire, porte d’ailleurs un dentier -, des poils pubiens d’une "chatte préhistorique", ou encore le véritable slip de bain de Tarzan, alias Johnny Weissmuller, rencontré dans un avion alors qu’il venait en promo à Helsinki - poivrot sexagénaire ringard - et négocié par Volotinen. Il y a aussi ce fauteuil Récamier qu’il est parti chercher à Paris pour l’offrir à Laura le jour de ses 50 ans, et qui connaîtra bien des tribulations avant de parvenir à sa destinataire.

Comme souvent chez Paasilinna, il s’agit plus d’une collection d’épisodes rocambolesques reliés un peu à la va-comme-je-te-pousse que d’une vraie intrigue romanesque. Mais les histoires de guerre ou ses prophéties new age nous sont épargnées. Le lecteur, donc, ne boude pas son plaisir, toujours épaté par la formidable imagination du Finlandais, sa verve, son humour à la fois grinçant et tendre. Comme la fin du livre, très viking et très émouvante. Jean-Claude Perrier

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