
Ebaucher un nouveau modèle économique global pour le livre face à l'émergence du numérique : l'objectif de ce 2e Forum mondial sur la culture et les industries culturelles était sans doute trop ambitieux. Abordant de front les problématiques, les débats auront en définitive suscité plus de questions nouvelles que de réponses, même incertaines. Pour Robert Darnton, le président de la Bibliothèque universitaire Harvard, les acteurs de l'industrie du livre souffrent "d'un cas de conscience collective erronée", les induisant en erreur sur la marche à suivre. "Ce n'est la faute de personne, mais c'est le problème de tout le monde si des idées incorrectes se répandent tellement rapidement qu'elles ne sont plus combattues", a-t-il lancé, visant notamment les Cassandre qui annoncent à intervalles réguliers la mort du livre alors que "chaque année le nombre de livres imprimés continue à augmenter dans le monde". Certes la part du numérique est vouée à progresser, mais les nouveaux modes de communication électronique seront de plus en plus jumelés avec les anciens, pense-t-il.
Un avis partagé par Jürgen Boos, le directeur de la Foire du livre de Francfort : "Avec les nouvelles technologies, les limites vont devenir de plus en plus floues entre les supports et les contenus. Jeux vidéo, films, livres et musique vont se mêler." L'Allemand souhaite voir les Etats assurer un revenu minimum aux auteurs pour qu'ils puissent vivre décemment et laisser le marché faire le reste. Santiago de la Mora, partenaire de Google Book Search, a défendu la politique de numérisation menée par le géant américain. Tout en assurant que, contrairement à son rival Amazon, "Google ne deviendra pas un éditeur. Nous essayons juste de rendre disponibles un maximum de livres aussi largement que possible", a-t-il déclaré, sans convaincre la majorité des 200 participants.
Renforcer les relations entre éditeurs et clients
La mise en cause des disparités entre les différents taux de TVA sur le livre aura, elle, créé l'unanimité. Un taux élevé "ne sera pas suffisant pour étouffer la croissance numérique, mais il peut la fragiliser", estime Riccardo Cavallero, directeur général pour le livre du groupe Mondadori. "C'est un énorme avantage pour les pays qui ne sont pas dans ce cas." Le rapprochement des éditeurs avec leurs clients, qui détiendraient désormais le pouvoir, est obligatoire. "Nous devons cultiver des relations directes, une démarche qui ne fait pas vraiment partie de l'ADN des maisons d'édition. Soit nous changeons notre façon de travailler, soit nous ne survivrons pas", a-t-il prévenu.