Qu'est-ce qu'une bonne couv'?

Audrey Petit, Livre de Poche - Photo Olivier Dion

Qu'est-ce qu'une bonne couv'?

Barbare à grosse épée ou graphisme épuré ? Pour contenter les fans de l'imagerie traditionnelle et attirer des lecteurs qui trouveraient cette iconographie puérile ou pompière, les éditeurs et leurs directeurs artistiques jouent les équilibristes.

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Créé le 26.10.2018 à 13h10

C'est le débat -éternel où tout le monde a raison : -comment -sortir du cliché -adolescent, mais toujours donner à -rêver... » Ainsi Gilles Dumay, qui -dirige Albin Michel Imaginaire, résume-t-il le -dilemme des éditeurs de SF et de fantasy au -moment de choisir la couverture d'un livre. « En tant qu'éditeur de genre, on a du mal à -remettre en cause notre intui-tion -esthétique, confesse Stéphane Marsan, directeur éditorial de Bragelonne, leader sur la fantasy. Prend-on le risque de ne pas être identifié tout de suite, dans l'espoir d'attirer un -nouveau public poten-tiel ? Quand la -rentabilité d'une série se joue à 1 000 exemplaires, on -hésite. » Gilles -Dumay, lui, n'a pas trop hésité pour lancer sa collection. « J'aime les couvertures qui claquent, j'ai été très marqué par celles de Frank -Frazetta dans les années 1970. Chez Albin Michel, je voulais donner la priorité à l'image. -Ainsi qu'une typo énorme qui mette en avant le nom de -l'auteur, et qui doit nous aider à être reconnaissable au premier coup d'œil. » Toucher la cible prioritaire par la vue reste donc l'objectif premier. « Tout en étant dans l'air du temps, la couverture et la typographie doivent parler immédiatement de l'histoire, commente Audrey -Petit, directrice littéraire au Livre de poche. Par exemple, nous allons republier Conan, qui n'était plus disponible en poche.Nos petites intégrales auront des couvertures évocatrices mais dont la mission sera de ne pas effrayer. »

Evolution esthétique

Directeur artistique des Moutons électriques, Melchior Ascaride regarde beaucoup ce qui se pratique en Angleterre. « Là-bas, l'état d'esprit général est différent autour de l'imaginaire, qui est bien mieux perçu. Et le travail sur l'habillage des couvertures concerne l'ensemble de la littérature. » Il estime de plus que l'évolution des littératures de l'imaginaire doit aller de pair avec une évolution esthétique. « Certains codes visuels sont en train d'être dépassés, on le remarque sur les couvertures beaucoup plus sobres des dernières éditions du Seigneur des Anneaux ou du Trône de fer. Bien sûr, tout est question d'équilibre. Pour le label Les saisons de l'étrange, par exemple, sur lequel je publie des fictions fantastiques en hommage aux romans-feuilletons, je joue à fond sur les codes de la culture Z ou des comics. » Côté poche, Pocket a opté pour une charte plus limpide l'an dernier, avec un Pantone métallique commun et une typo différente pour la SF, la fantasy et le fantastique. J'ai lu tente l'épure sur des valeurs sûres, comme les séries phares de George R.R. Martin et Robin Hobb, mais avance avec prudence. « On avait tenté une maquette plus fluctuante pour certains auteurs qui auraient pu sortir du rayon SF habituel, mais ça n'avait servi à rien », se souvient Thibaud Eliroff, le directeur de collection. En effet, si la sobriété est la -marotte des graphistes actuels, le public ne suit pas forcément. L'Atalante avait choisi cette voie pour sa collection poche. « Les couvertures sobres, à vocation -généraliste dans leur conception graphique, avaient -emballé représentants et libraires, raconte Mireille -Rivalland, sa directrice. Mais les lecteurs étaient en manque de repère et d'identification, et les résultats sur la durée n'ont pas été à la hauteur des attentes. Nous allons retoucher la collection et remettre une image sur la première de couverture. On le sait, les couvertures, c'est l'expérimentation permanente. » W

26.10 2018

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