Incroyable mais vrai : depuis le 1^er juillet de cette année, à la suite d'une mobilisation de son maire et de ses habitants, il existe à nouveau en Ukraine une ville qui s'appelle New York ! Elle est située aux confins du pays, dans le Donbass, à quelques encablures de la frontière avec la république de Donetsk séparatiste inféodée à Moscou. C'est une cité industrieuse de 10 000 habitants, que Staline avait rebaptisée Novhorodske (ville nouvelle), autrefois cosmopolite, d'où son nom rappelant que les steppes ont toujours été terres de migrations et d'invasions, depuis les Grecs d'Asie Mineure jusqu'aux Russes. Au XIX^e siècle, New York comptait ainsi une importante communauté d'Allemands mennonites, des anabaptistes qui avaient fui les persécutions. Ils ont fondé la maison Unger - aujourd'hui centre culturel et musée, le seul lieu d'attraction de la ville -, comme l'ancienne usine de phénol, la pizzeria-boulangerie, et le bar Le Family.

C'est dans cet endroit improbable, où le temps semble s'être figé à l'ère soviétique, avec ses bâtiments dans le plus pur style stalinien, ses rues déprimantes et son climat rude, que le photographe de presse Niels Ackermann et le journaliste Sébastien Gobert, installé en Ukraine depuis dix ans, ont choisi de nous emmener, et de nous guider, comme pour un vrai voyage. Outre l'histoire de la ville, ses curiosités (le musée, terrible, offre toute une collection de débris de roquettes) et les portraits de quelques-uns de ses habitants, on nous indique où manger, sortir ou dormir à New York, le plus souvent chez l'habitant ! Les photos sont superbes, et l'ensemble est bien décalé. À la fin, le maire, Mykola Lenko, affiche un bel optimisme : il compte sur l'actualité (la guerre au Donbass) pour attirer l'attention sur la région, et les touristes, à nouveau, dans sa ville. « Promouvoir l'idée de la New York ukrainienne, c'est une nouvelle étape », dit-il après avoir remisé une statue de Lénine, déboulonnée et fracassée par ses administrés.