1er Roman/France 9 janvier Véronique Boulais

Déjà, à l'état civil, c'est un roman. S'appeler Foulques-Marie Béranger-Castex n'est peut-être pas ce qu'il y a de plus approprié pour des débuts dans la vie. En littérature, en revanche...

Soit donc Foulques (simplifions), héros comme en creux du premier roman de Véronique Boulais ; un garçon qui n'est ni d'hier ni d'aujourd'hui, hors du temps, hors du désir aussi. Si ce n'est celui de peupler sa solitude de celle des autres, théorie d'outsiders pareillement entre le zig et le zag de leur existence. Parmi eux, la narratrice, une femme entre deux âges et deux chagrins, enseignante perpétuellement chahutée par ses élèves et par la vie, son unique amour l'a quittée et c'est une scène initiale qu'elle se « rejoue » sans cesse avec une morose délectation. Elle trouve en Foulques moins un compagnon d'infortune qu'une solitude en miroir, qui lui assigne enfin ce qu'elle cherche confusément, une place où se tenir. Il est vrai que Foulques, après avoir été un Oblomov désargenté, sans femme ni perspective si ce n'est celle des visites régulières chez son psy, est désormais, par suite d'un improbable héritage, un riche « aquoiboniste », promenant sa cour (des miracles) et ses désirs exsangues de palaces en capitales, de soirs de première en restaurants étoilés. Ça ou autre chose, Foulques s'en fout ou c'est tout comme, générant sous le prétexte de plus en plus contestable de l'amitié, autant de soumissions, autant de redditions. A ce jeu de dupes, y a-t-il quelque chose à gagner ?

De Véronique Boulais, auteure de ce très intrigant Foulques, coup d'essai plein de maîtrise et d'ironie joliment désespérée, on ne sait rien ou presque (elle aurait quitté l'enseignement pour se consacrer à l'écriture), ce qui n'est pas plus mal eu égard à la nature spéculative et erratique de son texte. Une recherche sur Internet exhume tout de même un vieil article intitulé « Samuel Beckett : une écriture en mal de je ». Ce qui orientera justement son lecteur entre trouble et ravissement vers la métaphysique sarcastique de Molloy et finalement, plus sûrement encore, vers la grâce infinie du Daimler s'en va de Frédéric Berthet. Quoi qu'il en soit, Foulques arrive et c'est une bonne nouvelle.

Véronique Boulais
Foulques
JC Lattès
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 16 euros; 230 p.
ISBN: 9782709662604

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