J’ai déjà eu ici l’occasion de dire tout le mal que je pensais de Wikipedia, cette « encyclopédie » collective née en 2001, qui est en réalité la négation même de l’esprit encyclopédique tel qu’il s’est forgé au siècle des Lumières. Pour l’instant, cette aventure navrante ne cesse d’engranger des succès d’audience — comme la Star Ac de TF1 ne cesse de cumuler les bons audimats, sauf que personne, pas même Etienne Mougeotte, n’irait prétendre que la Star Ac incarne la référence en matière de variété… Mais la résistance s’organise. Dans son édition d’hier, le Financial Times révélait l’existence d’un projet concurrent, lui aussi gratuit, baptisé Citizendium (pour Citizen compendium of everything, qu’on pourrait traduire par « ressources citoyennes sur tout et n’importe quoi », ou, moins légèrement, par « abrégé citoyen des connaissances »). Il est révélateur de constater que le porte-parole du projet n’est autre que Larry Sanger, l’un des fondateurs de Wikipedia, qui avait justement quitté le navire au bout seulement d’un an, effondré qu’il était par son contenu. Le principe de Citizendium ? Surfer sur la vogue du wiki, donc continuer de faire appel à la participation collective, mais en s’entourant cette fois d’experts. Et même, le « gros » mot est lâché : d’éditeurs. On s’amuse, d’ailleurs, dans le pitch de présentation de citizendium (httpp://citizendium.org) de voir avec quelles prudentes circonlocutions les auteurs du projet avancent le terme d’ « editors », conscients qu’ils risquent de choquer les tenants d’un Internet sans barrière d’aucune sorte. Mais réintroduire la notion d’éditeur, c’est tout simplement revenir à cette validation du savoir, fondement de l’esprit encyclopédique que Wikipedia ignore superbement. Autre « innovation », qui serait pareillement un retour aux (bonnes) sources : les articles, du moins les plus importants, seraient signés. Pour l’instant, Citizendium n’en est qu’à l’état de vœu pieux : « Nous ne savons pas si ça va prendre, ni si ça va marcher », expliquent ses animateurs. En attendant, Jimmy Wales, autre co-fondateur de Wikipedia, et toujours aux commandes, interrogé par le FT , répondait « qu’au nom de la liberté d’expression », il n’entendait rien changer à ce grand foutoir de l’à-peu-près qu’est Wikipedia. L’ignorance a encore de beaux jours devant elle.
15.10 2013

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