avant-portrait Rentrée littéraire > Julia Kerninon

Ces deux dernières années ont été plutôt productives pour Julia Kerninon: en 2016, elle a soutenu sa thèse de doctorat en études anglophones (et publié son deuxième roman); début 2017, elle a quitté Paris pour se réinstaller à Nantes, sa ville natale, avec son compagnon (et publié un bref récit autobiographique); en novembre de la même année, elle a eu un fils puis, dans les semaines qui ont suivi la naissance, a terminé Ma dévotion, une histoire d’amour et de peinture entre Rome, Londres, Amsterdam et la Normandie racontée par une octogénaire, son troisième roman accueilli dans "La brune" au Rouergue.

L’écrivaine a à peine dépassé les 30 ans mais, en lisant à l’aveugle chacun de ses quatre livres, on met le lecteur au défi de deviner l’âge de leur auteure: prose classique et bien coupée, langue intemporelle sans mots d’époque… Peut-être parce qu’elle a déjà vingt-cinq ans d’écriture derrière elle, comme elle l’a raconté dans Une activité respectable, courts Mémoires d’une jeune fille précoce où elle revient sur son enfance auprès de parents instituteurs et globe-trotteurs, fous de livres, qui ont offert à leur fille une machine à écrire électrique quand elle avait 5 ans et demi.

Optimiste

"A partir de la 4e, j’ai écrit un roman par an", raconte-t-elle. A la fin de l’adolescence, du temps où elle fréquentait le monde du slam, elle s’essaie à la littérature jeunesse et publie sous pseudonyme deux romans chez Sarbacane, en 2007 et 2009. "Un gros bide." "A l’époque, je n’assumais pas mon patronyme breton. Je voulais surtout garder mon nom pour le jour où mes romans seraient publiés. Mais je ne lisais que de la littérature étrangère, américaine en particulier, donc je ne connaissais pas du tout l’édition française." Prix Françoise-Sagan, prix René-Fallet, prix Edmée-de-La-Rochefoucauld, son entrée officielle en littérature, quelques lettres de refus et une rencontre plus tard, avec Buvard, premier roman publié en 2014, n’est pas passé inaperçue. Elle a écrit ce livre, qui met en scène une gloire littéraire retirée dans la campagne anglaise, à Budapest où elle a fait plusieurs longs séjours. Et où se situe aussi Le dernier amour d’Attila Kiss, prix de la Closerie des lilas et de la Page 112 en 2016.

En fille pressée, elle a déjà un roman terminé dans les tiroirs et toujours "des petits et des gros chantiers" en cours, projets de genres différents qu’elle fait avancer en parallèle pour ne pas connaître l’angoisse de la page blanche: une version sous forme d’essai de sa thèse aux Puf, des idées pour d’autres petits textes autobiographiques et, pourquoi pas, un polar. Elle dit qu’elle a retenu, dans un livre américain plein de "conseils pourris" pour écrire, un seul qui lui a semblé juste: "repousser sa peur".

Egalement lectrice pour des maisons d’édition, Julia Kerninon vit désormais, même si ce n’est pas fastueusement, de la littérature. A l’occasion, elle traduit des livres comme, en ce moment, un recueil d’entretiens avec des écrivains qui ne veulent pas avoir d’enfants. Pas un choix qu’aurait fait cette jeune femme "très optimiste", confiante dans une bonne organisation et surtout "trop curieuse pour passer à côté de la maternité", un de ses futurs sujets d’écriture. Véronique Rossignol

Julia Kerninon, Ma dévotion, Rouergue, "La Brune". Prix: 19,50 euros, 304 p. Sortie: 22 août

ISBN: 978-2-8126-1639-6

Les dernières
actualités