A FORCE de lire mes bêtises, certains d'entre vous doivent se demander : mais c'est qui ce type (je n'écris pas « mec » de peur d'être confondu avec Bigard, l'homme qui regarde trop internet)? Eh bien je veux vous rassurer, chers lecteurs, ce blog est suivi de près par les plus hautes institutions de ce pays. Récemment je proposais, avec un brin d'ironie fort peu patriotique je dois l'avouer, d'organiser des Jeux Olympiques réservés aux seuls Français pour que nous obtenions enfin quelques médailles d'or. Voilà, c'est fait ! Le ministre de l'Education, Xavier Darcos, a décidé de distribuer des médailles d'or, d'argent et de bronze aux meilleurs bacheliers. Excellent. Je propose un amendement : que l'on fixe des minimas scolaires pour se présenter au bac afin d'éviter aux professeurs de corriger toutes ces copies. Boutefeu, ministre de l'Identité française, y ajoutera que parmi les Français seuls les Martin, Dupont et Durand pourront recevoir une médaille. C'était notre rubrique : restons entre nous, on est quand même mieux. S'cuz'-moi Princesse . Je vous entends dire : ce type (parce que Bigard…) n'est pas objectif à se moquer ainsi de ministres du Président. Bon, je vais essayer de défendre le Président, enfin presque. Pour une raison qui restait jusqu'alors assez mystérieuse cet homme estimable puisque élu par une majorité de Français, a lancé une croisade contre La princesse de Clèves de Madame de Lafayette. Vous pourriez me dire en quoi cela le concerne-t-il ? A reprendre l'excellent blog du Bibliomane ( http://lebibliomane.blogspot.com/ ) voici l'historique des faits. Le 23 février 2006 devant un parterre de militants UMP, l'Omniprésident s'en prend au programme de concours d'entrée d'attaché d'administration : « Un sadique ou un imbécile, choisissez, a mis dans le programme : interrogez les concurrents sur La Princesse de Clèves . Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé de demander à la guichetière ce qu'elle pensait de La Princesse de Clèves . Imaginez un peu le spectacle… » Il remettait ça en deux fois cette année. Là on voit poindre une explication au courroux présidentiel : « Je n'ai rien contre, je n'ai rien contre, mais enfin… j'avais beaucoup souffert sur elle. » Vengeance contre un professeur ? Ou bien, selon une explication psychanalytique (« sadique », « guichet », « souffrir sur elle »…), frustration d'un cheval fougueux ? Avec mon mauvais esprit, je me suis donc précipité sur Arte qui présentait en avant-première La Belle personne de l'écrivain-metteur en scène Christophe Honoré, inspiré de la Princesse de Clèves . Avec mon honnêteté, je dois avouer que cette défense de la Princesse est pour le moins mal illustrée dans ce film. D'abord j'ai fait beaucoup souffrir mes voisins. J'ai dû en effet monter le son de mon téléviseur au maximum pour comprendre ce que disaient les comédiens. Je suis bien placé pour savoir que l'adolescence est le deuxième âge des borborygmes (j'approche du troisième) mais ils demeuraient totalement incompréhensibles. Ajoutez une jolie brochette de fils et petit-fils (filles) à papa et de têtes à claques, tous blancs, et Mme de Lafayette subissait les derniers outrages dans les ruelles malfamées du 16 e arrondissement. L'Omniprésident, grand téléspectateur devant l'Eternel, a dû reconnaître des quartiers qu'il connaît bien et se convaincre que décidément ces princesses de Neuilly ou de Clèves... Vous oyez que je sais être objectif. Ah si un détail : quand je vais à la Poste chercher un livre nous échangeons avec ma postière quelques titres de romans que nous avons aimés. Au guichet ! Bon et difficile à la fois. J'aime François Bon. L'homme et ses livres. Son blog aussi ( http://www.tierslivre.net/spip/ ). Il lui arrive de travailler avec des prisonniers, des ouvrières. C'est un écrivain dans la vie. Rien ne lui semble indifférent jusqu'aux dernières technologies. Il va jusqu'à offrir des possibilités de publications sur Internet de textes d'auteurs originaux ( http://www.publie.net/ ). Pour toutes ces raisons, on lit avec un intérêt tout particulier son appel aux bloggeurs littéraires. Il se plaint de ces rentrées où l'on parle toujours des même livres, des mêmes auteurs et des prix qu'on leur promet : « Même le monde des blogs, qui devrait être le contre-pouvoir, s'embarque à chaque fois dans ces casseroles comme s'il s'agissait de la littérature elle-même (…) D'où mon invite, amis bloggeurs : ne vous contentez pas d'être les médiateurs de la chose écrite intervenez dans la vie littéraire elle-même . » Quelques réactions montrent que répondre à l'invite de François Bon n'est pas aisé. Il y a celle des « wanabe », ces « écrivains » qui voudraient être « publiés » et se cognent à des murs de refus. Je vous renvoie à la réponse de Wrath qui perd un peu de sa virulence en même temps qu'on la voit grandir dans son écriture ( http://wrath.typepad.com/ ). Il y a celle de bloggeurs en voie de professionnalisation, de presque-journaliste comme Anne-Sophie Demonchy ( http://www.lalettrine.com/ ). Toutes deux disent que les lecteurs les attendent sur les « auteurs hype du moment » ou « les livres qui font l'actualité. » Et puis il y a la masse des bloggeuses qui ne répondent pas au Bon appel, gourmandes de livres, des classiques aux plus contemporains, qui mêlent critiques littéraires et recettes de cuisine car les livres font tout simplement partie de leur vie. Il leur arrive d'être un peu naïves, mais elles ont défendu, souvent avant les professionnels, Millenium ou le célèbre Hérisson de Muriel Barbery. Elles remercient les éditeurs qui leur offrent des livres ce qui vaut à Denoël après un envoi massif de faire un carton avec La fausse veuve de Florence Ben Sadoun. Sauf que le premier enthousiasme passé, les réserves commencent à monter. Cela ne s'appellerait-il pas : l'indépendance ?
15.10 2013

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