13 OCTOBRE - NOUVELLES Corée

Avec la talentueuse Eun Hee-Kyung et son recueil remarqué Les boîtes de ma femme (2009), Zulma nous avait donné un avant-goût de la vitalité littéraire coréenne, également récemment louée par les éditions Cartouche, qui viennent de publier trois auteurs nés après 1970 dans J'étais un maquereau. On retrouve ici la romancière dans ce recueil collectif qui réunit sept autres écrivaines contemporaines, pour des histoires ancrées dans le Séoul d'aujourd'hui.

Si on ne veut pas tenter de rapprocher à tout prix ces écritures différentes, on peut noter une communauté de tons et d'inspirations qui donne de l'homogénéité à l'ensemble : autour de relations hommes-femmes, parents-enfants, ces nouvelles ouvrent une large fenêtre sur une société où des signes très modernes de liberté côtoient des vieux restes d'oppression sociale et domestique, et entretiennent des conflits d'autant plus violents qu'ils sont souvent feutrés. Peut-être le titre de la première nouvelle, "Le couteau de cuisine", où une fille se souvient de sa mère, tenancière d'un restaurant, qui vient de mourir, à travers cet objet de la vie quotidienne qui nourrit et qui arme à la fois, cet objet totémique qui résume sa vie de mère et de femme active, aurait-il pu être un autre titre global pour ce recueil, d'autant que manger a une grande importance dans presque toutes ces histoires.

Voilà donc des nouvelles souvent noires, parfois crues, en tout cas frappantes : quand les personnages ne sont pas dans la solitude pure et simple, >les hommes et les femmes vivent séparés par un mur invisible, restent liés par des sentiments contraints faits de frustration et de rancune croupie, de sens du devoir. Poursuivant des relations éteintes, de dissimulations en accommodements ou impuissants à mettre fin aux abus de pouvoir, telle l'épouse battue qui continue de cohabiter avec son tyran dans "La philosophie dans son boudoir".

"Tu vois, ça ressemble à un point d'exclamation : savoure simplement sa douceur, n'en fais pas un point d'exclamation trop grave », c'est la phrase qui, dans la nouvelle qui donne son titre au recueil, passe de bouche à oreille, en même temps que de main en main, d'amant à amant, de mari à maîtresse, un "cocktail sugar", bâtonnet enrobé de sucre, à tremper dans le café. Tout a l'air plutôt léger, dans ce ballet adultère, marivaudage sautillant parfaitement réglé. Attendez d'avoir vu le tableau final...

04.06 2015

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