Sous les traits condensés d'un Bildungsroman, Daniel Arsand (né en 1950) restitue trois souvenirs - d'amours et de violences -, de sa jeunesse. « Tout regard a quelque chose de troublant. » D'abord, l'amour pour la mère, l'indispensable, éveille chez cet enfant unique, mélancolique et littéraire, une certaine fascination pour les femmes - qui s'arrête à leur visage. « Il en est qui ont la beauté au front et la mauvaiseté au cœur », le prévient sa mère, se moquant de sa naïveté, lorsqu'il a 13 ans.

Désormais cavalier seul, il chasse l'enfance et rencontre l'autre, la sexualité, l'amour et l'humiliation, la violence des hommes. Son premier coup de foudre, pour un garçon du lycée, tourne au viol. Le désir, la peur, l'audace, la honte, l'hésitation, l'excitation se mélangent et se muent en stupeur - il y a la tête, romantique, qui fantasme si fort qu'elle recouvre les alertes d'un corps réifié qui « songe à fuir », mais ne peut plus rien. « Vas-y prends, petite pute. » Sa deuxième histoire, amoureuse et idyllique, s'achève en abandon soudain. Puis c'est lui qui possède un amoureux refoulé et l'éconduit, s'inspirant du premier scénario. Il s'en tire avec un tabassage collectif et homophobe en règle. « En n'ayant pas l'amour comme moteur dans ma vie, je m'évite les déceptions qui lapident. »

Avec son art de la formule tranchante et puissamment évocatrice, Daniel Arsand rend compte des schémas qu'impriment les expériences amoureuses et sexuelles originelles sur l'existence.