9 JANVIER - BD France

Photo ARNAUD LE GOUËFFLEC ET OLIVIER BALEZ/GLÉNAT

Le scénariste Arnaud Le Gouëfflec et le dessinateur Olivier Balez sont déjà les coauteurs, entre autres, de l'original Chanteur sans nom (Glénat, 2011). Ils persistent dans le même univers en se glissant avec un beau culot dans la peau de Dominique A, comme d'autres en leur temps dans celle de John Malkovich. Le chanteur emblématique du renouveau de la scène musicale française au début des années 1990 leur a donné sa bénédiction. "Je savais que mon double était entre de très bonnes mains", écrit-il en préface. Son personnage n'en fait pas moins l'objet, à partir de l'oeuvre du chanteur, au plus près du texte de ses chansons, d'un décapage en règle dans cet album décalé, profil psychologique aussi crédible que fantasmé, doublé d'une aventure burlesque, pleine de rebondissements.

Les deux auteurs imaginent Dominique A, déjà poursuivi par un sosie particulièrement collant, également menacé par l'auteur d'une lettre anonyme ("J'aurai ta peau Dominique A"). Anxiété, crises de paranoïa... Le chanteur n'en mène pas large. Il cherche un refuge improbable auprès de son confrère et ami Philippe Katerine. Il fait appel à des gardes du corps plus ou moins efficaces. Il perd pied peu à peu, miné par l'inquiétude et des interrogations existentielles, en phase avec la tonalité de son oeuvre d'abord influencée par le mouvement punk, avant de s'exprimer sur un mode plus mélancolique, sombre et ténébreux : pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Qu'ai-je fait pour mériter cela ?...

A mesure qu'évolue la réflexion introspective, le suspense croît lui aussi. Car comme l'annonce son titre, l'album d'Arnaud Le Gouëfflec et Olivier Balez est aussi un vrai polar, qui prend même sur la fin un tour original, magnifié par le dessin d'Olivier Balez. Celui-ci excelle à créer des ambiances tour à tour gaies ou menaçantes, inquiétantes ou énigmatiques. Il ajuste ses cadrages. Il soigne ses couleurs traitées le plus souvent par aplats savamment juxtaposés. Surtout, il travaille leur articulation avec un noir qu'il répand souvent généreusement, produisant un climat aussi approprié à la représentation d'un état mental qu'à la mise en scène d'une action qui oscille sans cesse entre la pochade et le drame.

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