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Dossier Psychologie et psychanalyse : le temps du renouveau

OLIVIER DION

Dossier Psychologie et psychanalyse : le temps du renouveau

Après avoir surfé avec succès durant deux ans sur les actualités de Freud et Lacan, les éditeurs cherchent un second souffle pour contrer le recul du secteur et accompagner un lectorat en renouvellement. Recentrant la production, ils misent sur les classiques et la pédagogie autant que sur l'exploration de champs comme la neuropsychologie ou la psychologie sociale.

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Par Mylène Moulin
Créé le 03.10.2014 à 14h05 ,
Mis à jour le 04.10.2014 à 20h18

Cela a commencé avec Freud, tombé dans le domaine public en 2010, puis Lacan, dont on a célébré le trentième anniversaire de la mort en septembre 2011. Et aujourd'hui ? Sur quoi misent les éditeurs de psychologie et de psychanalyse après deux ans d'effervescence autour des deux grandes figures de la psychanalyse en France ? "Sur le renouveau », affirme Elsa Rosenberger, éditrice pour les sciences humaines au Seuil. Car malgré l'engouement constaté en librairie autour des textes de Freud et de ceux de Lacan, la psychanalyse est en perte de vitesse depuis plusieurs années. "Avant, la psychanalyse faisait l'histoire, aujourd'hui elle en fait partie. On assiste à un renouvellement de génération, avec des gens pour qui la discipline n'est pas du tout une évidence, constate avec lucidité Christophe Guias, responsable du secteur sciences humaines chez Payot. Il y a un vrai travail de pédagogie à faire."

"Avant, la psychanalyse faisait l'histoire, aujourd'hui elle en fait partie. On assiste à un renouvellement de génération, avec des gens pour qui la discipline n'est pas du tout une évidence." CHRISTOPHE GUIAS, PAYOT- Photo OLIVIER DION

Permettre aux lecteurs de se réapproprier la psychanalyse, c'est ce à quoi Christophe Guias aspire à travers la retraduction de textes classiques ou méconnus à destination d'un public élargi "pas forcément formé à la psychanalyse"."Cette démarche suppose trois étapes : traduire, s'approprier, s'affranchir de la vénération", >détaille l'éditeur. C'est ce qu'il a fait avec Freud en publiant une vingtaine de petits recueils thématiques depuis 2010, dont Pour introduire le narcissisme, paru en avril, ou encore Psychologie des foules et analyse du moi, suivi de Psychologie des foules de Gustave Le Bon. "Ces ouvrages de textes choisis permettent de rendre visible du contenu qu'on ne serait pas allé chercher dans des recueils aux noms obscurs, explique le responsable des sciences humaines chez Payot. Cela permet de faire vivre la pensée des fondateurs de la psychanalyse auprès d'une génération qui n'est pas familiarisée avec elle, de la rendre disponible et de la faire vivre." A l'automne, paraîtra chez Payot sous ce format Pulsion et destin des pulsions de Freud, mais également Un petit homme coq et Réflexions sur le masochisme de Sándor Ferenczi, et Sur l'enfant, le livre fondateur de Melanie Klein sur la psychologie infantile.

"J'ai tenté de faire de la psychologie plus grand public, mais dans ce domaine les ventes se font autour d'une poignée d'auteurs stars." ELSA ROSENBERGER, SEUIL- Photo OLIVIER DION

GRAND PUBLIC

D'autres éditeurs ont entrepris depuis plusieurs années de réaliser un travail de diffusion auprès du grand public, comme Larousse qui a publié en septembre dernier une nouvelle édition de son Grand dictionnaire de la psychologie et qui livrera à la rentrée Osez vous fâcher, mais pas n'importe quand ! Savoir quand les punir pour mieux les faire grandir du pédopsychiatre Gilles-Marie Valet. De son côté, First développe ces thématiques dans "First psycho" où sera publié en septembre Le bonheur est dans la citrouille, le prochain livre de Gilles Azzopardi (l'auteur du Manuel de manipulation, vendu à 35 000 exemplaires), ainsi que dans sa collection "Pour les nuls" où l'on trouve de nombreux titres de psychologie réalisant de très bons scores, tels que La psychologie pour les nuls qui s'est vendu à plus de 100 000 exemplaires, La PNL : programmation neuro-linguistique pour les nuls ou Les thérapies comportementales et cognitives pour les nuls.

Mathilde Nobécourt- Photo OLIVIER DION

Aux côtés d'éditeurs universitaires et professionnels bien assis en librairie, tels que De Boeck, ou Erès qui annonce 36 titres en psychanalyse d'ici à la fin de l'année dont le numéro 24 de sa revue Psychanalyse en juin et Lacan, lecteur de Melanie Klein de Marie-Claude Thomas en août, plusieurs maisons d'édition qui s'adressent traditionnellement au grand public se sont lancées à la conquête d'un lectorat plus érudit. C'est notamment ce que fait Dangles avec sa nouvelle collection "Psychothérapie et psychanalyse intégrative" créée en février, et qui vise « les professionnels de santé, médecins, psychologues et praticiens, ainsi que le public en recherche et tous ceux qui s'intéressent à la psychothérapie comme "fait social" et "laboratoire moderne de l'art de vivre"". Les éditions Eyrolles assoient quant à elles leurs collections de psychanalyse "Les chemins de l'inconscient", dirigée par le psychanalyste Saverio Tomasella, et "Comprendre et agir" où a été publié l'an dernier le best-seller Les pervers narcissiques de Jean-Charles Bouchoux, tout en continuant de développer parallèlement "Les mots de la psychanalyse" et "Concentré de psy", où ont déjà été publiés trois ouvrages : 100 % Dolto, 100 %Winnicott et 100 % Jung.

Jean Henriet- Photo OLIVIER DION

RATIONALISATION

Au Seuil comme chez Albin Michel, le nombre de parutions est revu à la baisse, notamment en ce qui concerne les titres adressés à un large public. Le premier, éditeur historique de Lacan, recentre son offre sur les professionnels et le public dit "motivé". Il va progressivement cesser de publier des ouvrages de psychologie destinés au grand public. Il convient de souligner le succès des ouvrages lacaniens - le dernier séminaire de Lacan s'est écoulé à 9 000 exemplaires, depuis sa parution il y a six mois, et le livre d'Elisabeth Roudinesco, Lacan envers et contre tout, comptabilise 12 000 ventes. "J'ai tenté de faire de la psychologie plus grand public, différente du développement personnel en plein essor, mais il faut reconnaître que dans ce domaine les ventes se font autour d'une poignée d'auteurs stars et que cette politique ne correspond pas à l'image du Seuil dont la tradition dans ce domaine est beaucoup plus réflexive", explique Elsa Rosenberger.

Yannick Lerible- Photo OLIVIER DION

Après avoir édité en avril Les chagrins d'amour de Patrick Avrane, un auteur phare du Seuil, Elsa Rosenberger publiera encore Les enfants et le savoir : d'où vient le désir d'apprendre ? de Martine Menès, en septembre prochain. Mais ce sera peut-être le dernier titre dans ce registre, car l'éditrice compte "petit à petit abandonner" ces ouvrages destinés au grand public. Dans un souci de rationalisation, elle ne publiera pour le moment plus que 4 à 5 titres par an, et annonce que ceux initialement prévus pour la rentrée sont reportés sur 2013. "Ce seront uniquement des livres de fond théoriques et exigeants sur ce qui peut apporter de la nouveauté sur le plan clinique, ainsi que des ouvrages qui ouvrent le débat sur l'exploration de champs nouveaux" (voir article p. 59).

Chez Albin Michel, Mathilde Nobécourt a réduit le nombre de titres publiés dans la collection "Questions de parents", mais a augmenté en revanche le nombre d'essais psy-société. L'éditrice annonce 18 titres en psychologie et psychanalyse pour cette année, dont une nouvelle édition en juin de Vivre le deuil au jour le jour, le best-seller de Christophe Fauré vendu à 60 000 exemplaires depuis sa première publication en 1995. Pour la rentrée, 8 titres seront mis en place dont Pardonner à ses enfants, écrit par Maryse Vaillant, dix ans après le succès de Pardonner à ses parents. En octobre, Mathilde Nobécourt publiera également Le règne de la séduction. Un pouvoir sans autorité, du pédopsychiatre Daniel Marcelli. Mais l'événement de la rentrée sera peut-être la publication de La tyrannie du choix, un essai de la psychologue et philosophe slovène Renata Salecl, préfacé par Michel Schneider, et auquel l'éditrice prédit le même retentissement que No logo de Naomi Klein, paru chez Actes Sud en 2001, qui analysait la tyrannie des marques à laquelle nous sommes inconsciemment soumis.

Alors que les éditeurs adoptent une posture de repli, en librairie, le discours est plutôt optimiste. Chez Decitre, à Lyon, Catherine Linares, responsable du rayon psychologie-psychanalyse, se dit satisfaite de la fréquentation et note même un "petit regain d'intérêt pour le livre de psychanalyse". Mais ce que la libraire a surtout remarqué ces derniers mois, c'est l'engouement pour la neuropsychologie, une discipline qui étudie le fonctionnement du cerveau et qui est en plein essor éditorial. "Les lecteurs sont professionnels, étudiants, ou même non initiés, et ils cherchent autant des ouvrages pointus que des titres faciles d'accès", constate-t-elle. Parmi les meilleures ventes du rayon : L'oeil de l'esprit d'Oliver Sacks (Seuil), Votre cerveau n'a pas fini de vous étonner (Albin Michel), ou encore Le cerveau sur mesure (Odile Jacob).

Chez Dunod, Jean Henriet a fait de ce qu'on appelait auparavant la psychologie cognitive "un élément marquant de [sa] politique éditoriale". Cette année, l'éditeur publie une Introduction à la neuropsychologie clinique, en mai, ainsi qu'un Mini manuel de psychologie cognitive dirigé par Laure Léger-Chorki et Fabien Fenouillet, et prévoit 4 nouveautés sur la neuropsychologie en 2013.

PSYCHOLOGIE SOCIALE

Autre discipline longtemps considérée comme mineure, la psychologie sociale prend de l'ampleur dans le catalogue des éditeurs de psychanalyse. Payot s'ouvre d'ailleurs à cette branche par la publication à la rentrée d'une Introduction à la psychologie positive : science de l'expérience optimale d'Ilona Boniwell, qui dispense des cours sur la psychologie positive dans le cadre d'un séminaire donné à l'Ecole nationale supérieure des mines. En juin, Armand Colin publiera L'identité en psychologie sociale : des processus identitaires aux représentations sociales de Jean-Claude Deschamps et Pascal Moliner, tandis que Dunod a prévu à la même période la réédition d'un ouvrage sur Le groupe en psychologie sociale de Verena Aebischer et Dominique Oberlé.

A Paris, la fermeture de la librairie de Thierry Garnier, en juillet 2011, a redistribué sa clientèle sur les autres librairies spécialisées, en particulier Lipsy et Le Divan. Dans cette dernière, Yannick Lerible constate que le rayon psychologie et psychanalyse ne s'essouffle pas et que la demande reste homogène. En tête des thèmes recherchés par le public et les professionnels : les relations mère-fille, l'amour durable et les problématiques liées à l'enfance. Cette dernière thématique sera d'ailleurs largement exploitée au cours de l'année 2012. Dunod livrera en juin 45 commentaires de textes en psychopathologie psychanalytique : l'enfant, l'adolescent et l'adulte de Jean-Yves Chagnon, ainsi qu'une analyse de L'enfant et les jeux dangereux : jeux post-traumatiques et pratiques dangereuses d'Hélène Romano. Un thème d'actualité en mai chez Armand Colin où Pierre G. Coslin y consacre un essai intitulé Jeux dangereux, jeunes en danger qui analyse ces activités auxquelles s'adonnent les enfants et qui sont susceptibles d'entraîner des dangers, d'un point de vue physique ou psychique.

De Boeck s'intéresse à la Psychopathologie chez l'enfant et l'adolescent : communication, apprentissage, hyperactivité d'Hervé Bénony et Jean Dumas, manuel d'introduction à la psychologie normale et pathologique du développement de l'enfant. On trouvera la même thématique chez Dunod qui publie en juin une Introduction à la psychopathologie de l'adolescent : approche psychanalytique de Pierre Sullivan. En mai, Odile Jacob lance A la rencontre des adolescents : les écouter, les comprendre, les aider de Catherine Jousselme et Jean-Luc Douillard, tandis qu'Albin Michel réédite Ados, amour et sexualité de Sylvain Mimoun et de Rica Etienne, dans une nouvelle édition revue et augmentée.

LA PRODUCTION

Photo SOURCE : LIVRES HEBDO/ELECTRE

Déjà en net recul en 2010, la production de nouveautés et de nouvelles éditions en psychologie et psychanalyse a encore fortement chuté l'an dernier, à 646 titres (- 30 %).

Nouveautés et nouvelles éditions

 

 

DUNOD CHANGE DE PEAU

Pour les quarante ans de sa collection "Inconscient et culture", Dunod a revu toutes les maquettes de ses ouvrages de psychologie et de psychanalyse.

"Une collection de psychanalyse qui dépasse les cinq ans d'existence, c'est une véritable victoire", estime Jean Henriet, qui constate que "le taux de mortalité des livres est élevé dans ce secteur ». Directeur éditorial du département sciences humaines et sociales de Dunod depuis vingt ans, il fête avec sérénité les quarante ans d'"Inconscient et culture". Créée en 1972 par Didier Anzieu et René Kaës, cette collection historique héberge des ouvrages collectifs qui abordent des thèmes très pointus qui font débat dans le champ de la psychanalyse, tels que L'invention de la pulsion de mort, Psychanalyse du lien tyrannique ou encore La vie psychique du bébé. Pour célébrer cet anniversaire et remettre en avant certains titres considérés aujourd'hui comme des classiques, les couvertures ont été refondues : couleurs unies et éclatantes, sobriété des lignes, nouveau logo identifiable.

"Nous avons voulu l'uniformiser, lui donner un nouveau look afin de rendre les livres plus repérables en librairie", confie Jean Henriet. Une démarche qui s'inscrit dans un vaste travail de refonte graphique des ouvrages de sciences humaines entamé par Dunod depuis mi-avril. Exit les traditionnelles couvertures aux illustrations "carrées". Désormais, les formes sont plus arrondies et les maquettes intérieures ont été revues. "Il nous fallait passer par un renouvellement graphique et visuel afin de montrer aux lecteurs que nous nous adaptons et évoluons avec eux", explique Jean Henriet.

Cette stratégie porte ses fruits. A la librairie Decitre, à Lyon, Catherine Linares, responsable du rayon psychologie-psychanalyse, note que la formule fonctionne, "notamment auprès des étudiants". C'est d'ailleurs ce public que cible Jean Henriet avec le lancement en juin des mini-manuels de Psychologie sociale et de Psychologie cognitive. Testés d'abord dans d'autres disciplines de sciences humaines, avant d'être appliqués à la psycho, ces ouvrages d'entrée de gamme "plus légers et rapides à lire" présentent sous une forme concise des notions essentielles, des exercices corrigés et des QCM, et devraient séduire les étudiants de licence.

L'ÉPOPÉE DU LIVRE ROUGE DE JUNG

Loin de Mao, Le livre rouge de Carl Gustav Jung n'est ni petit ni révolutionnaire. Il constitue en revanche un monument dans les écrits de psychanalyse et - à son échelle - le phénomène éditorial de ce début d'année. Après être resté pendant une centaine d'années à l'ombre d'un coffre-fort dans une banque suisse, le journal du frère ennemi de Freud est finalement reproduit et publié en 2009 en allemand et en anglais. Traduit en français, il est édité aux éditions de l'Iconoclaste en septembre 2011. Avant cette publication, une poignée de personnes seulement avaient eu accès à l'ouvrage qui contient "la confrontation personnelle" du psychiatre "avec l'inconscient ».

Depuis sa parution, ce livre calligraphié, enluminé et illustré par Jung lui-même réalise de beaux scores en librairie. Au rayon psychologie-psychanalyse de Decitre à Lyon, une centaine d'ouvrages ont été vendus en six mois et à la librairie Le Divan, à Paris, 150 exemplaires ont trouvé un acquéreur. Des ventes honorables pour cette édition exceptionnelle pesant cinq kilos, vendue à 200 euros, qui démontrent, selon Mathilde Nobécourt, chez Albin Michel, "que dans ce secteur, le lecteur n'a pas peur d'acheter quand le livre vaut vraiment la peine".

Sigmund Freud fait de la résistance

 

L'irruption en 2010 de l'oeuvre du psychanalyste dans le domaine public continue de générer une production abondante.

 

Photo DR

La grande entreprise de vulgarisation de la pensée de Freud entamée en 2010, quand l'oeuvre du père de la psychanalyse est tombée dans le domaine public, s'est poursuivie en 2011 avec la publication en poche de nombreux textes chez Payot, au Seuil, chez Gallimard et aux Presses universitaires de France. En 2012, les éditeurs poursuivront l'effort, mais avec une ambition critique plus grande et la volonté de s'adresser à un public de spécialistes ou de lecteurs motivés. Les Puf, qui ont par ailleurs publié depuis deux ans les principaux textes de Freud en poche dans la collection "Quadrige", annoncent pour septembre le volume 5 des ?uvres complètes, traduites sous la direction d'André Bourguignon, Pierre Cotet et Jean Laplanche, consacré à La psychopathologie de la vie quotidienne. Deux autres volumes achèveront la publication de cet ensemble en 2013 et en 2014.

En octobre, les Puf annoncent également la publication de La France et Freud d'Alain de Mijolla, une somme de plus de 1 000 pages publiée en deux volumes qui seront lancés simultanément. Cet énorme travail de dépouillement d'archives se penche sur la réception de Freud en France et construit une histoire de la psychanalyse française.

Après s'être intéressé de près, en 2011, aux Paroles d'hommes de Jacques André et aux Lectures et portraits de Donald W. Winnicott, Gallimard poursuit son exploration de la pensée freudienne en publiant cette année, en mai, deux ouvrages dans sa collection "Connaissance de l'inconscient", dirigée par J.-B. Pontalis, Religion ainsi que Le lac inconnu : entre Proust et Freud, une étude de Jean-Yves Tadié sur les thématiques communes aux deux auteurs sur le rêve, la mort, etc.

Le fondateur de la psychanalyse reste résolument sur le devant de la scène éditoriale avec de nombreux ouvrages consacrés à ses théories et à sa personne. Balland s'est offert en avril une incursion grand public dans le secteur avec Freud sous coke, une biographie signée de l'écrivain et réalisateur David Cohen, qui explore les zones d'ombre et les fragilités qui entourent l'enfance du psychanalyste et se penche sur ses rapports à la nicotine, au cigare puis à la cocaïne. Dans Mon analyse avec le professeur Freud, édité sous la direction d'Anna Koellreuter dans la collection "Champs" de Flammarion, on découvre le journal tenu par la psychiatre Anna G. d'avril à juillet 1921, pendant son analyse avec Freud.

"Faire dialoguer les disciplines"

 

Au Seuil comme chez Payot, les éditeurs cherchent à décloisonner la psychanalyse.

 

Elsa Rosenberger, au Seuil, et Christophe Guias, chez Payot, n'éditent pas les mêmes livres. La première maison est l'éditrice historique de Lacan, l'autre celle de Freud. Pourtant, les deux se rejoignent sur un point : pour faire évoluer la littérature de psychologie et de psychanalyse, il est indispensable de "créer un dialogue entre les disciplines".

Photo OLIVIER DION

Malgré une politique de réduction de la production, Elsa Rosenberger compte développer le nombre des livres d'exploration qui font se rencontrer les différents champs psychothérapeutiques : la psychanalyse, les thérapies comportementales, la psychologie cognitive, etc. "On ne peut plus se permettre aujourd'hui de mettre l'un ou l'autre de côté d'un point de vue théorique et clinique, estime l'éditrice, qui clame depuis des années la vanité d'un état de guerre entre les comportementalistes et les psychanalystes. Il y a quelque chose à penser sur l'éclatement du champ psychothérapeutique, sur la fragilisation clinique de la psychanalyse, sur les relations possibles et sur les renouveaux."

Dans ce sens, l'éditrice a publié L'animal à l'âme, un livre sur les psychothérapies accompagnées par les animaux, qui fait dialoguer la philosophie, l'éthologie et la psychanalyse, et trouve un écho favorable auprès des praticiens. Pour l'année à venir, elle porte un projet de livre sur l'EMDR et la systémie. C'est aussi dans cette perspective qu'Elsa Rosenberger désire accorder plus de place dans son catalogue à la "socio-psycho", en demandant à des psychothérapeutes ou à des soignants en psychothérapie de poser leur regard sur des problématiques valables non seulement à l'échelle individuelle, mais aussi à celle de la société. Avec des ouvrages comme L'homme de sable de Catherine Ternynck, publié en octobre 2011, qui traite de la question de l'enracinement et de l'individualisme.

EXTÉRORISATION DE L'INTIME

Un autre titre sur la survalorisation de l'extériorisation de l'intime devrait voir le jour en 2013, et, en septembre, Patrick Coupechoux livrera un ouvrage sur l'état de la psychiatrie de secteur et des hôpitaux psychiatriques, et la remise en question du pouvoir des psychiatres dans notre société. Comme Christophe Guias, qui confie les préfaces de ses livres de psychanalystes à des écrivains, des philosophes, des médecins, des historiens et cherche ainsi à "décloisonner" le secteur, Elsa Rosenberger est convaincue que l'avenir du livre psy passera en partie par l'alliance de la philosophie et de la psychanalyse, qui permet d'intégrer la problématique du soin dans une réflexion sur les sciences humaines.


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