Du fonds, des coups de cœur et des animations

La table "psychologie" au Divan, Paris. - Photo Olivier Dion

Du fonds, des coups de cœur et des animations

Pour dynamiser leurs ventes et maintenir leurs linéaires, les libraires utilisent des moyens éprouvés dans d’autres secteurs.

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Par Cécile Charonnat
avec Créé le 23.05.2014 à 02h34 ,
Mis à jour le 23.04.2015 à 10h06

Les fermetures successives de la librairie de Thierry Garnier en 2012 et de Lipsy en janvier 2013, toutes deux situées à Paris et spécialisées dans le secteur, symbolisent bien la tendance. En librairie, les étagères dédiées à la psychanalyse et à la psychologie s’amenuisent, voir disparaissent, comme à La Librairie-café à Crécy-la-Chapelle, une bourgade de Seine-et-Marne de 4 300 habitants où Caroline Diéry a composé un rayon orienté uniquement vers le "bien-être et l’autoanalyse". Avec le risque d’envoyer, selon un schéma désormais classique, les clients plus professionnels sur les sites de vente en ligne et de favoriser Amazon. "C’est d’autant plus dommage que le public de sciences humaines est en général gros lecteur et curieux, donc susceptible d’acheter dans d’autres secteurs", pointe Marie-Françoise Dubois-Sacrispeyre, directrice éditoriale d’Erès.

Se battre.

Pour autant, à Crécy-la-Chapelle comme ailleurs, les libraires n’abandonnent pas totalement le champ de bataille. "Globalement, ils se battent beaucoup, avec intelligence, et n’hésitent pas à être inventifs et créatifs pour faire de leur librairie un lieu de rencontre et de vie", souligne France Perrot, gérante des éditions In press. A l’initiative de Florence Winter, psychologue clinicienne et cliente de La Librairie-café, Caroline Diéry inaugure ainsi le 14 juin un type de rencontre original autour du dernier ouvrage d’Elisabeth Brami, Dolto, l’art d’être parents, écrit avec Patrick Delaroche chez Albin Michel et disponible depuis le 5 mars. L’animation se déroule en deux temps et mêle d’abord jeune public et adultes lors d’une dédicace où une sélection des livres jeunesse d’Elisabeth Brami sera également proposée. Lui succédera un débat animé par Florence Winter dont le point de départ sera une citation de Françoise Dolto : "C’est l’enfant qui fait le parent.""Il s’agit de trouver un angle d’attaque original pour éveiller la curiosité des gens et les pousser à sortir le soir pour se poser des questions", explique Caroline Diéry.

"Les rencontres en librairie attirent un public très concerné. Il y a donc là un créneau à prendre et des livres à vendre", confirme Mathilde Nobécourt, éditrice chez Albin Michel. Au nombre d’une par mois en moyenne au Divan et chez Tschann à Paris, qui ont repris le flambeau de Lipsy, et de cinq à dix chez Ombres blanches à Toulouse, les animations constituent en effet une carte maîtresse que les libraires n’hésitent pas à abattre, jouant également sur le dynamisme des différents réseaux de psychanalystes et de psychologues et leur envie "de trouver des lieux de références pour échanger", note Yannick Lerible, responsable des sciences humaines au Divan. L’autre atout consiste à se transporter dans les colloques, qui génèrent du chiffre d’affaires et la possibilité de capter de nouveaux clients. "C’est une forme que les psys affectionnent et maintiennent donc, souligne Bernard Debail, fondateur de Lipsy, qui a trouvé refuge chez Tschann depuis février. Outre les contacts que l’on y noue, cela permet également de cultiver notre image et de manifester notre disponibilité et notre dimension militante. Il en reste toujours quelque chose en magasin."

Conseiller.

L’animation commerciale du rayon, et plus précisément la capacité à faire vivre son fonds, porte également ses fruits. Chez Ombres blanches, Samuel Pericaud propose régulièrement des tables thématiques, en lien avec l’actualité générale ou éditoriale alors qu’au Divan, où le fonds se retrouve très souvent en pile sur les tables, Yannick Lerible mise sur la notule, forme de conseil indirect qui "fonctionne très bien". D’une manière plus générale, et contrairement à une idée reçue, le conseil est effectivement recherché dans ces rayons. "Il peut s’agir de demandes très directes sur un sujet pointu pour l’approfondir ou préparer une conférence. Cela devient alors une sorte de défi à relever, qui nécessite des connaissances solides", raconte le libraire du Divan. C’est pourquoi le Seuil a choisi de privilégier la formation des libraires, conscient que "le conseil, donc la connaissance, est nécessaire pour défendre des livres difficiles et pas forcément attendus", soutient Elsa Rosenberger, éditrice de psychologie et spiritualités de la maison. Sous la houlette de Hugues Jallon, des formations portant sur différents secteurs des sciences humaines avaient été organisées. Le départ, en mai 2013, du directeur du département sciences humaines a interrompu les sessions, qui devraient toutefois reprendre prochainement, promet Elsa Rosenberger.

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