Reportage

Gangnam Style : la Seoul International Book Fair prise d’assaut

La Foire de Séoul s'est terminée le 22 juin - Photo JO LH

Gangnam Style : la Seoul International Book Fair prise d’assaut

La Seoul international book fair (SIBF) s’est déroulée du 18 au 22 juin et a réuni 150 000 visiteurs : un réel succès pour cette vitrine du marché du livre en Corée du Sud. Un stand français y était en bonne place à côté du pavillon de Taiwan, invité d’honneur.

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Par Judith Oriol , à Séoul,
Créé le 01.07.2025 à 11h00

En Corée-du-sud, la Seoul International Book Fair (SIBF) a fermé ses portes le 22 juin après avoir battu tous ses records (voir encadré). À tel point que les organisateurs – la Korean Publishers Association (KPA) et la Seoul International Book Fair Corporation nouvellement créée pour répondre à l’arrêt des financements publics – ont décidé d’arrêter les préventes de billets, dépassés par l’ampleur de la demande avant l’ouverture de la SIBF au Coex, grand mall de Gangnam, quartier huppé rendu célèbre par le chanteur Psy. Tout l’écosystème du livre était à la fête, des éditeurs aux librairies, en passant par les clubs de lecture, bénéficiant des foules assemblées pour apercevoir le célèbre acteur Park Jeong-min sur le stand de sa maison d’édition Muze, ou l’ancien président Moon Jae-in, propriétaire de la librairie Pyeongsan Books, qui a de quoi se réjouir : « Malgré la réduction du financement public (…), il est incroyablement encourageant de voir la foire du livre prospérer, grâce au soutien massif des lecteurs ».

Alors que la récente élection du président de centre-gauche, Lee Jae-myung, met fin à six mois d’instabilité politique et après une période de tensions entre la direction de la foire et le ministère de la Culture, des manifestants se sont réunis le 18 juin au Coex pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une privatisation de la SIBF et accuser les organisateurs de privilégier les intérêts des actionnaires de la société organisatrice au détriment de l'intérêt général.

French Touch

Un stand français de 90m2 a présenté les livres de plus de 80 maisons alors qu’un espace était investi par Chaekbang, librairie jeunesse récemment ouverte à Bucheon, la seule du pays à ne vendre que des livres en français. L’ambassade de France sur place avait invité des éditrices en provenance du Cambodge et du Vietnam afin de positionner Séoul comme une plate-forme régionale pour les professionnels français, bien que ces derniers se soient peu mobilisés cette année. « Les Français ont moins besoin de se déplacer à Séoul pour rencontrer leurs homologues sud-coréens qui participent davantage aux foires internationales de Londres, Francfort ou Bologne », explique Laurence Risson, responsable de projets chez France Livre.

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Sur le stand France - Photo JO LH

Nous y avons croisé Jérôme Baron, directeur des droits étrangers de Casterman, venu rencontrer les professionnels sud-coréens avec lesquels il a un long historique de partenariat, surtout en BD. Alors que Janice Yip d’Hachette Livre se rend à Séoul tous les ans, Adèle Rolland-Le Dem faisait son premier voyage pour présenter la front-list de Gallimard et travailler sa prestigieuse back-list dont les Sud-coréens restent particulièrement friands. En 2024, Aurélien d’Aragon et L’Invitée de Simone de Beauvoir sont parus pour la première fois en coréen, respectivement chez Chang Bi et Minumsa. « J’espère rétablir un équilibre entre le fonds et les nouveautés », affirme-t-elle.

Marion Glénat, qui se lancera dans le webtoon à la rentrée, a fait le déplacement, accompagnée de l’éditeur Hugo Manos. Enfin, l’auteure et journaliste Lilia Hassaine a présenté l’édition coréenne de son roman Panorama, dystopie sur la dictature de l'ultra-transparence, publiée par A certain book, devant un public coréen visiblement sensible au sujet. Yohann Le Tallec, attaché culturel à l’initiative de son invitation, confirme : « Ce que décrit Lilia Hassaine dans Panorama est assez proche de la réalité des Sud-coréens aujourd’hui. »  

Quant aux traductions de livres français, elles y étaient en bonne place chez tous les éditeurs généralistes. Ici, le mur des photos d’auteurs de la maison Munhakdongne s’ouvre avec Romain Gary et Annie Ernaux. Là, notre curiosité s’arrête devant le stand des éditions Jean Moulin. Son fondateur Lee Ha-kyu, qui publie Saint-Exupéry comme Marc-Antoine Mathieu, a autrefois fait des études d’Histoire à Strasbourg. Il en est revenu fasciné par les résistants français et a nommé sa maison d’après le plus célèbre d’entre eux !

Une valeur refuge

« Plus la vie est incertaine et difficile, plus les livres sont une source fiable pour trouver un lieu où reposer son esprit », a déclaré Yoon Chul-ho, président de la KPA, lors de la cérémonie d'ouverture.

Dans l’exposition consacrée au thème de cette année, « The Last Resort », 400 livres sélectionnés étaient présentés comme autant de refuges possibles en période de crise. Lorsque les temps sont durs, quel est notre « dernier recours » ? Le livre pardi, auquel l’accès est partout rendu ludique : concours d’écriture, goodies à gagner, recommandations d’e-books par l’IA, ou blind books, ces livres achetés à l’aveugle sur recommandation.

Records de fréquentation ... en attendant Paris ?

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