Chez Hachette Livre, il est souvent décrit comme un "super geek". Appliqué à Pierre Danet, directeur Innovation numérique Groupe et membre du pôle de compétitivité Cap Digital, l’expression est un compliment. Car pour lui, la culture geek, c’est avant tout "le goût d’essayer et de plonger dès qu’il y a une nouvelle technologie".

Il reste hanté par le regret d’avoir raté Java, ce langage Web des années 1990-2000. Pas seulement parce que "les premiers qui l’ont fait en France possèdent maintenant des châteaux", mais aussi parce qu’"il y a des tendances technologiques importantes et qu’il faut savoir prendre les bons tournants". Lesquels se multiplient. "Le phénomène qu’on vit est exponentiel, dit-il. Je fais partie de ceux qui pensent qu’il faut prendre ces transformations à bras-le-corps."

Amateur de science-fiction, Pierre Danet est fasciné par le progrès technologique et scientifique. "On est dans une phase de progrès technique, et c’est à l’humain de s’adapter", assure celui qui a été nommé chevalier de l’ordre des Arts et des Lettres en 2014. On pense au transhumanisme, ce mouvement qui prône l’usage des sciences et techniques pour améliorer les caractéristiques humaines. "Je suis transhumaniste par provocation et amusement, dit-il. En réalité j’attends de voir." Il cite Google, "la boîte la plus transhumaniste du monde". Il s’emballe en évoquant les biotechnologies, qui auraient la capacité de guérir la myopathie.

Surtout, ne pas rater une innovation. En 1993, alors journaliste rock et consultant, il surfait déjà sur Internet. "J’avais un modem 56k qui faisait du bruit pour se connecter et une adresse AOL, c’était fabuleux", se souvient-il. A l’apparition des blogs, il a de nouveau plongé, tête baissée. Il en tenait pas moins de trois, sous différents pseudos, qui parlaient - déjà - de technologie et de transformation numérique. L’un d’eux s’est taillé un beau succès, jusqu’à figurer 15e sur Wikio, le classement de référence des blogs en France. Aujourd’hui, il n’en a plus qu’un, sous son vrai nom. "J’ai décidé d’être "en clair". Je fais plus attention à ce que je dis", explique-t-il.

Maître dans l’art de convaincre

Roi du pitch, il est passé maître dans l’art de convaincre en quelques minutes, une qualité qu’il estime indispensable pour affronter la vie moderne, où le temps et l’attention manquent. C’est ainsi que, soucieux de "voir les Européens et les Français participer à l’établissement des standards de l’édition" et de ne pas laisser les sociétés américaines dicter leurs lois, il a réussi à monter le premier sommet ePub à Bordeaux.

Il connaît les risques de l’ultra-connection. Passé une certaine heure, ses trois enfants sont interdits de tablettes et de smartphones. Lui-même débranche grâce au tennis, mais aussi aux échecs, qui permettent de favoriser "mémorisation, calcul, focalisation et visualisation", énumère-t-il. On l’imagine volontiers en Kasparov livrant bataille contre la machine. Ou mieux : l’inverse. F. V.

01.04 2016

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