Au bout d'ma vie. Attention, auteur explosif ! Et ce n'est pas peu dire, ce serait même euphémique. Avec ses précédents Demain c'est loin, Shit ! ou Bastion (Seuil, 2017, 2023 et 2025), Jacky Schwartzmann a ouvert à la dynamite une voie inédite au cœur des digressions noires, à la fois venimeuses et lestes, caustiques et goguenardes. Ici encore, l'utilisation de l'épigramme tranchante demeure une constante. Rien que l'incipit du présent Killing Me Softly, comme un légitime appel à éliminer tous les guitaristes virtuoses et pénibles du rock, est à hurler de rire. La suite ne l'est pas moins. Même si Madjid, le tueur à gages et narrateur de l'affaire, n'a rien d'un tueur à gags. Un pro, Madjid, dont l'arsenal sarcastique n'épargne ni Damien Battant, son client du jour, prof à Sciences Po et abusé dans sa jeunesse, ni sa cible Robert Cuenot, vieillard sénile enchristé dans un EHPAD de Besançon. L'idée d'achever un mourant n'enchante guère Madjid, d'autant que le commanditaire souhaite impérativement assister au trépas du gâteux pointé et accessoirement l'émasculer. Il y a des limites au client roi. Alors tout part de guingois.
Roberta Flack a beau chanter qu'il convient de « tuer en douceur », la fin de vie est toujours un truc moche, voire compliqué lorsque l'exécutant et l'exécuté désigné deviennent copains, comme cochons pour le coup. Quant à la suite, ni Madjid ni nous ne la voyons venir. Le rationnel nous échappe, la morale peine à se frayer un chemin, même si une part d'elle triomphe à la fin.
Killing me softly
la Manufacture de livres
Tirage: 10 000 ex.
Prix: 15,90 € ; 192 p.
ISBN: 9782385532185
