13 JANVIER - BD Belgique

Photo JUDITH VANISTENDAEL/LE LOMBARD

Une histoire dramatique ne suffit pas à faire une oeuvre et, en lisant le synopsis de David, les femmes et la mort, on craint le pire : "Au moment où naît sa petite-fille Louise, David apprend qu'il a un cancer. Mais la parole n'a jamais été son fort et il préfère taire la maladie, la douleur et la fin qui se profile. Au grand dam des femmes de sa vie - sa femme Paula, ses filles Miriam et Tamar. Impuissantes, elles assistent à ce délitement silencieux, mais inexorable"... Mais on se souvient aussi que Judith Vanistendael n'en est pas à son premier pari risqué. Et qu'en se coltinant, dans le très autobiographique La jeune fille et le nègre (deux volumes parus en 2008 et 2009 chez Actes Sud-L'An 2), avec les problèmes des sans-papiers à travers la relation amoureuse d'un Togolais et d'une jeune Bruxelloise obligée de l'épouser pour empêcher son expulsion, elle avait évité les pièges du politiquement correct. Elle affirmait à la fois finesse d'observation et esprit d'autodérision.

La dessinatrice flamande évite de même le pathos et la mièvrerie dans David, les femmes et la mort, pour lequel elle est passée avec profit à la couleur. Elle livre lucidement et sans détour les états d'âme et l'anxiété de ses personnages obligés d'assumer l'évidence de la mort qui vient. Lui-même résigné, David s'efforce de profiter sans artifice de ses derniers instants au contact de sa femme, de ses filles et de sa petite-fille. Miriam se partage presque sans broncher entre sa fille nouveau-née et son père mourant. La petite Tamar manifeste jusqu'au bout à David son affection et sa joie de vivre. Tandis que Paula se trouve écartelée entre les charges du quotidien, son amour pour l'homme qu'elle aime et l'anticipation de sa disparition.

Réduisant les dialogues à l'essentiel, Judith Vanistendael se concentre sur les vibrations des corps et des esprits, restituant par son trait et ses couleurs jusqu'aux moindres changements de l'atmosphère. Son trait se charge même d'une sensualité envoûtante pour installer des ambiances où les angoisses le disputent à la tendresse ; désacraliser la mort et en faire un épisode, majeur, de la vie.

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