7 mai > Nouvelles France

Il doit avoir une pression pas possible, David Thomas. Imaginez que son nouvel éditeur, Stock, le présente comme un croisement de Félix Fenéon et d’Anna Gavalda. Le prosateur en question, on l’a découvert avec les nouvelles de La patience des buffles sous la pluie (Bernard Pascuito éditeur 2009, prix de la Découverte de la fondation Prince-Pierre-de-Monaco, repris au Livre de poche) qu’avait préfacé Jean-Paul Dubois, avant de le suivre ensuite avec Un silence de clairière (Albin Michel, 2011) et Je n’ai pas fini de regarder le monde (Albin Michel, 2012).

On ne peut que lui souhaiter de rencontrer avec On ne va pas se raconter d’histoires un succès comparable à celui de Philippe Delerm et sa Première gorgée de bière, bien que la tonalité des deux ouvrages ne soit pas tout à fait la même. Thomas se montre encore une fois un maître de la forme courte. Une page ou deux lui suffisent pour faire exister des êtres. Ici, on croisera des hommes et des femmes qui bataillent avec le quotidien et avec l’amour.

Un type avec un pistolet à eau, posté sur le canapé du salon, s’amuse à asperger son chat en douce. Un écrivain essaye d’être un bon père et travaille mollement. Un monsieur désire son épouse, surtout quand elle est en maillot de bain sur la plage. La dame, elle, lui demande si c’est par habitude ou par facilité. Les personnages qui évoluent dans ces pages au cordeau cherchent à avancer, à sortir des montagnes. A se rencontrer ou à garder une distance de sécurité avec les autres. L’écrivain qui les fait exister a le sens de la phrase, du portrait, de la chute. Il peut parler avec la même virtuosité d’une fille "aussi vulgaire qu’un tripoux à la mode de Caen, mais un tripoux à vous faire monter le mât dans la seconde", ou d’une mère qui offre à son fils "des plaisirs simples enrobés dans du coton".

On ne va pas se raconter d’histoires se savoure gorgée après gorgée. Le cocktail est parfait dans le dosage des ingrédients qui le composent. Dans la manière de glisser de l’humour à la mélancolie avec élégance.

Alexandre Fillon

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