PAPIER

Le papier bouffant représente une microniche sur le volume global du marché du papier.- Photo OLIVIER DION

Avec quelques dizaines de milliers de tonnes de consommation annuelle, par rapport à un volume global qui se mesure en millions de tonnes, le papier destiné à l'édition de livres est "une microniche de marché", juge Jean-Philippe Delcroix, DG d'Arctic Paper France, filiale du groupe suédois spécialiste des qualités à usage graphique. C'est vrai du bouffant, utilisé dans l'impression de livres. Cette qualité représente de trop faibles quantités pour être identifiée dans les statistiques du secteur, marquées par un recul de la production en France : - 25 % pour les papiers "impression-écriture" à la fin de novembre, selon la Copacel. Le plongeon est dû à la fermeture de la papeterie d'Alizay (Eure), d'une capacité de production de 300 000 tonnes, filiale du finlandais M-Real. "Mais les éditeurs n'utilisaient pas beaucoup ce papier qui servait surtout à faire de la ramette", indique Ghislaine Bléry, responsable de la lettre spécialisée Pap'Argus.

Les restructurations dans le papier bouffant ont déjà eu lieu, avec une vague de fermetures dans les années 2000. L'offre est limitée à quelques acteurs, souligne le DG d'Arctic Paper, devenu un des spécialistes reconnus avec ses différentes gammes de Munken. Son principal concurrent, l'autrichien Salzer, est importé par Barki Agency. En France, seules les papeteries de Vizille, dans les Alpes, et celles de Bolloré, dans les Vosges, en produisent encore, de qualité "sans bois", qui ne jaunit pas.

"Il faut savoir maîtriser les contradictions pour fabriquer du bouffant, qui doit être à la fois épais et imprimable", >explique Jean-Philippe Delcroix. Comme il y a au plus une vingtaine d'acheteurs significatifs en France, et les mêmes proportions dans le reste de l'Europe, il est peu intéressant pour les papetiers de se lancer dans cette spécialité complexe aux débouchés limités. Les variations de consommation d'une année sur l'autre se jouent sur la présence, ou non, d'un grand best-seller. "Nous sommes dans un phénomène de niche, donc les prix ne baissent pas", ajoute Ghislaine Bléry. La tonne de bouffant sans bois se négocie autour de 1 100 euros, la qualité avec traces de bois, utilisée aussi en grand format, se négocie de 800 à 900 euros, et le bouffant avec bois, pour le poche, se situe entre 700 et 800 euros. Dans les grands groupes, une variation de quelques euros atteint une somme importante en fin d'année. La gestion plus fine des stocks et la réduction du pilon qui représenterait 20 à 25 % de la consommation pour le livre, ne produisent pas encore d'effet notable selon les papetiers, malgré les efforts des vendeurs de presses numériques, dédiées aux courts tirages. Clairefontaine (Vosges) a toutefois lancé depuis trois ans une gamme de bouffant pour l'impression numérique (Clairejet), marché encore plus étroit, et s'en trouve très bien selon son représentant, Jean-Marc Dubois. Quant au papier couché sans bois, pour le beau livre et la quadri, c'est un autre paradoxe : de meilleure qualité, il sert aussi à d'autres usages, et les producteurs restent plus nombreux, se livrant une concurrence sévère.

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