Essai/France 21 mars Bernard Cottret

Les Tudors, c'est comme un épisode de Columbo. Même si on connaît la fin au début, on veut savoir par quels moyens ils se sont débarrassés des gêneurs, l'assassinat et la hache ayant leur préférence. L'histoire de cette dynastie commence à la bataille de Bosworth, en 1485. Richard III s'y effondre. Henri Tudor, comte de Richmond, futur Henri VII, met fin à la suprématie des Plantagenêts. Jusqu'en 1603, à la mort d'Elisabeth Ire, les Tudors vont régner sur l'Angleterre sans partage. Cinq règnes - dont celui de Bloody Mary, Marie Tudor la reine sanglante - forment comme un pont au-dessus de la Renaissance pour passer du Moyen Age à l'âge baroque avec des personnages shakespeariens.

Du père fondateur Henri VII à Elisabeth, dont Hugo dira qu'elle était « vierge comme l'Angleterre est île », Bernard Cottret galope avec l'assise du spécialiste. « L'Histoire est un château hanté ; il n'est pas rare que l'on y croise de faux prophètes et de vrais assassins, d'authentiques escrocs et des héros sublimes. » Si la farce côtoie la tragédie, le drame, lui, est en l'occurrence toujours funeste, ne serait-ce qu'avec les six épouses d'un Barbe-Bleue aussi obsédé par les plaisirs de la chair que par la taille de son mollet qu'il comparait volontiers à celui de François Ier.

Professeur émérite à l'université de Versailles-Saint-Quentin, Bernard Cottret explique qu'à l'inverse de leurs prédécesseurs les Tudors ne se considérèrent pas systématiquement rois ou reines de France. Ils ont recentré leur politique sur l'Angleterre en posant les fondements de l'expansion coloniale. Le facétieux historien présente également la rupture d'Henri VIII avec Rome comme le premier Brexit... Ce qui est plutôt bien vu. « Avant de se séparer finalement du reste de la catholicité latine, Henri VIII demanda aux universités d'Europe de prendre parti. » Il y eut donc des pour et des contre. De même, la rivalité entre Elisabeth et Mary Stuart reste une fracture toujours vive entre l'Angleterre et l'Ecosse, y compris sur le Brexit.

L'accident de Bosworth s'est transformé en destin pour cette famille exceptionnelle. Bernard Cottret la restitue avec un sens aigu de l'anecdote en réveillant les Tudors dans un véritable souffle épique qui traverse ce feuilleton britannique.

Bernard Cottret
Les Tudors
Perrin
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 25 euros ; 448 p.
ISBN: 978-2-262-06611-6

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