7 janvier > Premier roman France

De la tour Farnèse, où il est emprisonné, Fabrice del Dongo est saisi par "l’image sublime de Clélia Conti". De la même manière, lorsque Fabrizio Annunziato aperçoit de la lucarne de sa cellule la belle serveuse croisée plus tôt dans un café de Florence, il accueille cette vision telle une épiphanie salvatrice. C’est que cela fait déjà pas mal de temps qu’il est enfermé dans le couvent San Marco, le musée dédié à Fra Angelico. Une plaisanterie puérile qui a tourné en mauvaise blague, alors qu’il s’amusait à enfermer un couple d’amis dans une des petites salles décorées des fresques du peintre du Quattrocento en poussant la porte et la verrouillant avec l’imposante clé placée en évidence dans une étroite niche aménagée dans le mur. Camelia dei Bardi, employée du musée, au lieu de l’admonester lui fait subir - toujours pour rire - le même sort. Et vlan ! Voilà le traducteur parisien d’ascendance italienne quasi quadragénaire bouclé pour le grand plaisir du couple ami vengé et pour le plus grand bonheur du lecteur du premier roman de Yan Gauchard, Le cas Annunziato. Le protocole de cette fiction capillotractée une fois établi, on peut se laisser emporter, sourire aux lèvres, par le rocambolesque d’une intrigue que sert une plume aussi légère qu’ironique. C’est qu’entre-temps Camelia dei Bardi a été appelée d’urgence car son père vient de succomber à un arrêt cardiaque, et les deux camarades touristes tellement distraits par le practical joke qu’ils en ont oublié leur victime demeurée captive. Le personnel du musée vient de faire grève ? Ça tombe bien, notre héros a dans sa sacoche un pensum politique italien à traduire. Fabrizio prend son mal en patience mais, bon, les jours passent et rien à manger. Alors quand Raphaëlla, la beauté brune du café, passe devant sa cellule, le reclus malgré lui fait des grands signes et elle lui envoie des vivres à travers la lucarne. A Florence, la contestation altermondialiste gronde, on est au printemps 2002. Le retour de Berlusconi n’arrange rien. Parmi les manifestants, un mort, moult blessés. Quand le directeur du musée qui avait entrepris au même moment de faire des travaux de restauration s’aperçoit qu’un intrus est dans les murs, il appelle les carabiniers, lesquels sont convaincus qu’il s’agit d’un comploteur pro-Brigades rouges. N’a-t-il pas dans son sac le brûlot La democrazia marcia, "La démocratie pourrie" ? Sean J. Rose

06.11 2015

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