7 mars > Mémoires Irlande

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Personne n’a oublié The dead. Moins la nouvelle de Joyce que le film de John Huston, qui avec cette adaptation, retour aux sources de l’enfance et de son monde englouti, s’absentait de la vie de la plus élégante des manières. C’est exactement le même genre d’émotion qui prédomine à la lecture des Mémoires de l’octogénaire Edna O’Brien, Fille de la campagne. Si rien, bien sûr, ne permet de penser qu’il s’agisse d’un adieu, c’est un fascinant exercice de temps retrouvé. Impression renforcée par sa volonté de lui donner comme titre presque celui de son premier roman, Les filles de la campagne. Sa publication en 1960 ne fut pas un scandale que pour la catholique Irlande qui crut avoir réchauffé un serpent apostat en son sein et en interdit la diffusion ; il le fut aussi pour la romancière, qui achevait ainsi sa mue et sa libération, au prix du rejet des siens. C’est d’une plume d’une profonde humanité, guère apaisée, qu’O’Brien évoque aujourd’hui ces jours de colère et de tristesse. Dans un récit impressionniste et hyperréaliste, elle fait surgir les fantômes d’une Irlande « noire », travaillée par le péché, où l’oppression sociale, religieuse et sexuelle tient lieu de tables de la loi. La figure qui s’en détache, altière et paradoxalement aimante, est celle de la mère, bourreau et victime, courageuse et impitoyable.

Mais on ne peut réduire ce livre au récit de ce temps pour son auteure d’avant l’écriture, même s’il en est la source. Tout aussi fascinantes sont ces pages où elle évoque sa vie dans ce « Swinging London », qu’elle se surprend elle-même à trouver à sa mesure. Ces jours de gloire et d’or qui l’amènent à New York ou à Paris, rouage sarcastique d’une délicieuse société du spectacle, à partager l’amitié de Jackie Onassis, à se faire offrir des suppositoires par Marguerite Duras, à laisser Paul McCartney improviser une chanson pour son fils, à aimer comme un frère ou un fils Robert Mitchum ou Richard Burton. Tous ces doux oiseaux du passé qu’Edna O’Brien nous restitue dans tout l’éclat de leur jeunesse. Et partant, de la sienne. O. M.

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