Édito par Fabrice Piault, rédacteur en chef

Photo PHOTO OLIVIER DION

Année de célébration des soixante-dix ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale et des massacres et des génocides qui l’ont accompagnée, 2015 a vu l’aboutissement de multiples projets éditoriaux sur le sujet, du document au beau livre et à la jeunesse en passant par la littérature. Pourtant, l’un des plus ambitieux, une édition critique de Mein Kampf, initialement prévue pour le début de 2016, est aujourd’hui dans l’impasse en France quand il est prêt à déboucher en Allemagne. Dans l’enquête que nous publions cette semaine, Laurent Lemire explique en détail pourquoi et comment ce projet, sur lequel ont travaillé pendant des années un traducteur et de nombreux historiens, s’est, au fil d’une série de contretemps parfois tragiques, complètement enlisé.

S’il souligne la fragilité des bases sur lesquelles repose souvent le travail éditorial, cet échec est profondément dommageable et il faut espérer qu’il ne soit que provisoire. L’an prochain, la profession de foi d’Hitler - laquelle n’a pas "fait le nazisme" mais que le nazisme a faite, comme le rappelle l’historien et éditeur Fabrice d’Almeida - sera dans le domaine public. Il est essentiel qu’existe enfin une version de Mein Kampf passée au crible du regard des historiens et des scientifiques, particulièrement dans cette période de l’histoire de l’Europe où ressurgissent, certes sous des formes différentes, les fantômes des années 1930.

Par l’un de ces curieux télescopages dont l’actualité éditoriale est coutumière, la publication de l’œuvre monumentale d’une des victimes du nazisme est, elle, imminente. Le fondateur du Tripode, Frédéric Martin, a investi presque jusqu’à sa chemise pour éditer Vie ? Ou théâtre ? de Charlotte Salomon, cette jeune artiste assassinée à 26 ans, enceinte, en 1943 à Auschwitz, que David Foenkinos a fait connaître à un très large public l’an dernier avec Charlotte. Ceux qui ont vu la formidable exposition qui lui a été consacrée en 2006 au musée d’Art et d’Histoire du judaïsme, à Paris, se souviennent du choc provoqué par la découverte des peintures flamboyantes de la jeune femme. La lecture de l’ouvrage que Le Tripode a reconstitué leur en réserve un second en révélant, avec le roman graphique le plus impressionnant de la rentrée, un talent qui embrassait la peinture pour la porter bien au-delà.

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