17 septembre > nouvelles Etats-Unis

Les lecteurs de Richard Ford suivent Frank Bascombe, depuis Un week-end dans le Michigan (Payot, 1990, repris chez Points). On découvrait là un journaliste sportif, divorcé, ayant renoncé à une carrière d’écrivain. Il était évident que son créateur avait un don unique pour évoquer la douleur et la tristesse. Il l’a prouvé dans la suite des tribulations de son personnage : Indépendance (L’Olivier, 1996, repris chez Points) et L’état des lieux (L’Olivier, 2008, repris chez Points).

Frank Bascombe est cette fois le protagoniste des quatre nouvelles d’En toute franchise. Notre homme a désormais 68 ans. Il vit à Haddam, dans le New Jersey, avec sa femme Sally. Toujours inconsolable du décès de son fils Ralph, emporté à 9 ans par la maladie de Reye, il a deux enfants adultes : une fille vétérinaire et un fils qui dirige une jardinerie.

Frank, qui a réchappé d’un cancer de la prostate, a voté Obama deux fois, n’a pas de compte Facebook, mange du All-Bran au petit-déjeuner et trouve que "Vous allez bien ?" est la formule la plus cruelle dans le monde moderne. Il ne travaille plus dans l’immobilier et accueille une fois par semaine des soldats rentrant chez eux après une mission en Afghanistan ou en Irak, "fatigués et déboussolés".

Il lui arrive également de faire la lecture à des aveugles, portant son choix sur L’énigme de l’arrivée de V. S. Naipaul : à bien des égards, "un livre à écouter dans le noir, au cœur d’une saison froide et ténébreuse". Le voici qui reçoit le coup de fil d’Arnie Urquhart, entrepreneur à qui il a jadis vendu sa maison sur la côte, à Sea-Clift, maison qui vient d’être soufflée par un ouragan. Frank a aussi la visite de Mme Pines, une professeure d’histoire qui, elle, a habité sa maison de Haddam quand elle était jeune.

Cette dernière lui raconte l’histoire de ses parents, lui parle de son père qui a tué sa mère et son frère avant de se suicider… Plus loin, le lecteur accompagne Frank lorsqu’il se rend auprès de son ex-femme, Ann, qui lutte contre la maladie de Parkinson, afin de lui apporter un oreiller orthopédique. Ne pas non plus rater l’appel d’Eddy Mellow, une vieille connaissance à lui, qui tient à l’informer qu’il est en train de mourir et souhaite avant cela lui délivrer une étrange confession…

L’auteur de Canada (L’Olivier, 2013, prix Femina étranger, repris chez Points) se montre plus que jamais à son meilleur. Avec un regard impitoyable dans sa description des êtres, des lieux et des situations difficiles. Ford fait merveille quand il évoque ce à quoi l’on se raccroche et ce qui s’envole en fumée en un clin d’œil. L’écrivain l’évoquant avec autant de lucidité que d’émotion. Alexandre Fillon

 

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