15 mars > roman France > Judith Brouste

"Le monde est un mythe, une légende racontée." Chacun bâtit la sienne selon ses souvenirs, son évolution ou ses émotions. Poète, essayiste et romancière (Le cercle des tempêtes, sur Mary Shelley, Gallimard, 2014), la Bordelaise Judith Brouste a décortiqué son histoire auprès de Jacques Lacan. Mais certains pans ont pu surgir bien plus tard. Dans ce roman délicat, l’auteure va "à la rencontre de la petite fille [qu’elle a] été". Elle prête ses traits à l’héroïne, Catherine. A la mort de son père, celle-ci pénètre dans l’antre de cet homme secret. C’est là qu’elle découvre une pile de carnets chronologiques, écrits à l’encre de Chine. Il s’agit ni plus ni moins de ses premières années de vie, rédigées par son père.

"Voilà mon commencement. Je suis née de son écriture. Jour après jour, à l’insu de tous, il a retracé le journal intime d’une enfant dont il a fait un personnage." Un regard précis et soucieux sur cette fillette fragile, souvent malade et parfois bègue. Les images reviennent instantanément. Elles se mêlent à celles d’un pays en guerre ; l’Indochine où son père, Tissègre, a œuvré comme chirurgien militaire. Une ambiance d’insurrection et d’indépendance qui va de pair avec la chute du monde colonial.

La petite fille naît alors que "les lames tranchantes du mensonge et du pouvoir sont aux portes de l’Empire". Des hommes s’affrontent tout en essayant de préserver un semblant d’univers insouciant. "Gagner, c’est tenir. Mon père m’inculque la passion de survivre." Une autre guerre s’impose à Paris, le 13 novembre 2015. Jusqu’à quel point peut-on se cacher dans un abri ? "L’écriture vient lorsque rien d’autre n’est possible." K. E.

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