28 août > Roman France

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Les trois sœurs de La ruche, le dernier roman d’Arthur Loustalot, s’appellent Marion, Claire et Louise ; les jeunes filles, à peine sorties de l’adolescence, vivent avec leur mère Alice. Rien de tchekhovien ici, nulle nostalgie en pointillés, on est plutôt dans l’hystérie des rapports de famille ou de couple des films d’Ingmar Bergman et de John Cassavetes. L’auteur de 24 ans, dont on avait remarqué le subtil recueil de nouvelles Là où commence le secret (JC Lattès, 2012), ajoute à sa palette de peintre des sentiments en demi-teintes des couleurs tour à tour sombres et acides pour précipiter le lecteur dans la violence d’un huis clos pathétique. C’est de l’expressionnisme abstrait : dès les premières pages, nous voilà un peu perdu dans une ronde de dialogues sans cesse interrompus par les commentaires névrotiques de la mère. Arthur Loustalot, au moyen d’un phrasé véloce, traduit bien la frustration de l’enfermement des trois sœurs face à la folie de leur mère. Les descriptions sont les didascalies de cette tragédie de l’amour filial impuissant, les gestes suppléent les mots qui se heurtent à l’indicible mur de la douleur.

Depuis le départ de son mari, il y a deux ans, Alice a sombré dans la spirale de l’autodestruction : colère, mépris de soi, alcool, tabagie, calmants… envies de suicide. Marion, l’aînée, assure le bon fonctionnement de la maisonnée qui part à vau-l’eau. Claire, la plus rebelle, entend exister malgré le chaos, et Louise, la petite « Lou », espère toujours une issue positive à l’impossible statu quo. « La lettre de papa » qu’elles ont trouvée au courrier annonce sans doute la demande en divorce d’un homme excédé par des années de scènes de ménage, surtout ne rien dévoiler à maman.

Papa battait-il maman ? Etait-il le monstre d’égoïsme, l’escroc qu’elle ne cesse de décrire… La ruche, c’est l’histoire de l’amour que portent ces filles à leur mère, mais aussi à leur père - le drame vécu par les enfants quand les parents se déchirent. C’est enfin le récit d’une tendre solidarité entre les enfants liés par le malheur et le sang, le sang de l’hérédité qui empoisonnait sûrement déjà tout l’être d’Alice, avant même qu’elle ne se fût mariée. S. J. R.

11.10 2013

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