Deux ans après 

Maisons-Alfort : la librairie-école, une affaire qui marche

Librairie-école La Ruche, avenue du général-de-Gaulle à Maison-Alfort. - Photo Olivier Dion

Maisons-Alfort : la librairie-école, une affaire qui marche

Deux ans après son ouverture à Maisons-Alfort (Val-de-Marne) suivant un concept inédit en France, La Ruche parvient à constituer à la fois un laboratoire pour les apprentis de l'École de la Librairie et un commerce rentable.

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Par par Johanne Burgell
Créé le 08.07.2022 à 15h51

En poussant la porte de La Ruche, la luminosité saute immédiatement aux yeux. De larges baies vitrées laissent pénétrer les rayons du soleil dans l'établissement de 82 m2. Le lieu est chaleureux. Le premier étage en mezzanine donne une sensation d'espace dans lequel le livre est roi. Étagères aux murs, meubles équipés de roulettes pour adapter l'environnement au gré des besoins, La Ruche n'a rien à envier aux autres librairies. Elle a cependant une particularité : il s'agit d'une librairie-école, la première en France. Créée à Maisons-Alfort par l'École de la Librairie, elle fêtera ses deux ans le 1er septembre. « Ce lieu représente un laboratoire dont nous sommes convaincus de l'utilité », se félicite Caroline Meneghetti, la directrice de l'École de la Librairie, avec le recul de deux ans d'activité.

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Caroline Meneghetti, directrice de l'École de la Librairie.- Photo OLIVIER DION

Formation sur le terrain

L'école compte 180 apprentis inscrits en brevet professionnel, âgés en moyenne de 20 à 25 ans, et une vingtaine d'élèves en licence professionnelle. Elle accueille également 65 personnes en reconversion professionnelle, ainsi que les formations continues pour les libraires déjà en poste. Isabelle Gagnon, la directrice de La Ruche, ouvre ses portes aux apprenants deux fois par semaine. « Le lundi, il y a des exercices de vente ou des cours lorsque la librairie est fermée. Le jeudi, ils se déroulent avec la clientèle. Les professeurs et les élèves ont accès à toutes les données de La Ruche et aux stocks, afin de s'entraîner à la gestion. Les clients, eux, ne savent pas nécessairement qu'il s'agit d'une librairie-école », explique-t-elle. Accueillir des apprentis permet à Isabelle Gagnon d'obtenir des regards différents sur sa librairie, sa vitrine ou encore sur la disposition des livres et la mise en place des rayons. « Il existe tant de possibilités. Par exemple, nous avons des budgets dédiés aux vitrines, ce qui n'est pas le cas dans la plupart des librairies, se réjouit la directrice de La Ruche. L'idée c'est d'arriver à ne pas être "plan-plan". Nous nous remettons perpétuellement en question et nous sommes amenés à penser notre métier et nos actions. »

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Librairie-école la Ruche, Avenue du général-de-Gaulle à Maison-Alfort.- Photo OLIVIER DION

À 29 ans, Francesca Pullberg, ancienne élève en brevet professionnel à l'École de la Librairie, vient tout juste d'être embauchée en CDI à La Ruche. Elle a effectué son apprentissage à l'Oiseau Moqueur, à Sucy-en-Brie, puis a travaillé à Montmorency, à la librairie Au Connétable. Aujourd'hui, elle voit défiler les apprentis à La Ruche. « Quand nous mettons en place des exercices de vente, se rendre dans une librairie connue facilite les choses. Cela permet d'acquérir davantage de confiance en soi. En tant qu'apprentie, y avoir accès, c'est super ! », lance-t-elle dans un large sourire. Léo Saurel, lui, 23 ans, est l'actuel apprenti de La Ruche. Il travaille aux côtés d'Isabelle Gagnon et de Francesca Pullberg. Posés sur les couvertures des livres, de nombreux petits mots écrits sur fond bleu pour conseiller les clients sont signés de sa main. « Ils ne permettent pas forcément de conclure une vente, reconnaît le jeune homme. Mais ils enclenchent une discussion, et c'est le but. » Le libraire en herbe, avenant, très sollicité par les clients, est en licence professionnelle. « Travailler ici nous permet de proposer des choses nouvelles et de réfléchir à notre métier. La Ruche sert à la fois de repère et de lieu d'entraînement », se réjouit-il.

Démarrage exceptionnel

Le concept plaît donc aux apprentis, mais est-il rentable ? « Oui » répond sans hésiter la directrice de La Ruche. « Nous avons 9 000 références, pour un peu plus de 80 mètres carrés. C'est un ratio classique pour une librairie généraliste. Notre première année fiscale était sur dix mois mais nous avons fait l'équivalent de douze mois. Nous avons réalisé un chiffre d'affaires de 490 000 euros, c'est assez exceptionnel », se félicite Isabelle Gagnon. Caroline Meneghetti confirme : « Réaliser un tel chiffre d'affaires pour cette superficie correspond à un démarrage très fort. » La directrice de L'École de la Librairie met d'ailleurs un point d'honneur à faire preuve d'une transparence totale : « Si on nous pose des questions sur nos chiffres, on les donne. Nous sommes une librairie-école, donc ils doivent être accessibles à tout le monde. Nos chiffres sont aussi consultables sur les outils de la profession, comme l'Observatoire de la librairie. »

Si, en raison de la pandémie, les années 2020 et 2021 ont été particulières pour les libraires, elles l'ont également été pour les apprenants. « La première année d'ouverture, ils ont été à distance 90 % du temps. Tout ce que nous avions imaginé a été nécessairement réduit au minimum, déplore Caroline Meneghetti. Nous n'avons pas encore exploité le champ des possibles à 100 %. Nous souhaiterions en faire beaucoup plus, notamment dans le lien à créer entre La Ruche et l'École. Il faudrait que nos apprentis investissent davantage la librairie-école. » Les clients, eux, sont déjà au rendez-vous. Ils sont en moyenne une cinquantaine par jour.

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