On voudrait n'y voir qu'un incident isolé. N'empêche, les images de manifestants détruisant rageusement, mardi 12 novembre à la faculté de droit de Lille, les exemplaires en vente du dernier livre de François Hollande suscitent un malaise tenace. Rappelant les autodafés pratiqués dans les années 1930 en Allemagne et ailleurs, elles témoignent d'une dégradation profonde du débat démocratique.

Dans une lecture optimiste, on pourra toujours déceler dans cette opération violente la confirmation que le livre reste bien l'un des instruments privilégiés de l'expression et des échanges d'idées, que certains veulent abattre. Mais elle révèle plus encore la montée de l'indifférence, quand ce n'est pas celle du mépris à l'égard d'un produit culturel dont l'usage et les fonctions sociales sont de plus en plus fréquemment méconnus, voire dénigrés dans de multiples cercles.

Trente-deux éditeurs de littérature générale le notent à leur manière en pointant, dans une tribune parue dans Le Monde (13 novembre), le recul du livre à la télévision. Certes, les écrivains et plus largement les auteurs, du moins les plus connus, font les beaux jours des émissions d'actualité ou de variété dont ils contribuent à composer les plateaux, admettent-ils. Mais leurs œuvres sont toujours plus mal exposées, et les émissions littéraires disparaissent, déplorent-ils en réclamant chez les directeurs des chaînes un sursaut volontariste.

Dans le même temps, la validation par les pouvoirs publics, puis par le Conseil d'Etat du changement de doctrine de l'Agessa interdisant la rémunération des directeurs de collection en droits d'auteur, et ce sans qu'un dispositif de remplacement ait été imaginé, conduit à restreindre le champ de la création éditoriale. Au-delà des acteurs de la chaîne du livre, l'élaboration d'une politique globale de soutien à la lecture, au livre et à la création est devenue une nécessité d'intérêt public.

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