Son prénom, elle le doit à Ma nuit chez Maud. Son père n'était pas insensible au charme de Françoise Fabian, l'interprète du personnage auquel se réfère le titre du film d'Eric Rohmer. Maud Simonnot a aussi reçu en héritage un attrait certain pour les heures nocturnes qui enveloppent les scènes du film. Son premier livre, le récit de vie de Robert McAlmon, auteur et éditeur américain aujourd'hui tombé dans l'oubli, s'intitulait La nuit pour adresse (Gallimard, 2017). La jeune femme a aussi signé un Goût de la nuit, dans la petite collection d'anthologie de textes thématiques au Mercure de France. L'ombre est son amie. L'éditrice de Nathacha Appanah ou d'Aurélien Bellanger chez Gallimard est du genre discret. Elle sort pourtant du bois à l'occasion de la rentrée littéraire avec sa toute première fiction : L'enfant céleste.

Comment la benjamine du comité de lecture de la NRF et mère de deux enfants trouve-t-elle le temps d'écrire ? La nuit, pardi ! « Je me lève à trois, quatre heures du matin, c'est mon moment », confie-t-elle avec un sourire enthousiaste qui vous convertirait le plus gros dormeur aux vertus de ses horaires noctambules. Mais les nuits de Maud ne sont pas faites de ténèbres. Quand la vie diurne se tait, le ciel s'illumine d'étoiles et la nature se rappelle à la petite fille qu'elle fut et qui vécut dans le Morvan, à l'orée de la forêt. Elle rêve aussi des îles.

Une enfance sauvage

Parisienne depuis vingt ans, la primo-romancière ne s'est jamais sentie de la paroisse germanopratine. Fille de la République et de babyboomers « babas cools » ayant fait des études (père professeur de sciences et mère sage-femme, tous deux enfants de la campagne), elle insiste : « La méritocratie, ça existe ! » Maud Simonnot passe une enfance sauvage, livrée à elle-même entre nature et ouvrages empruntés à la bibliothèque. « Je dois tout à la bibliothèque », dit-elle : après Dumas, Jules Verne et quelques « Bibliothèque verte », elle se met à lire tout par ordre alphabétique.

Elle est abonnée à La Hulotte, revue scientifique pour enfants. Elle se passionne pour Tycho Brahe, astronome danois de la Renaissance au destin fabuleux, fondateur du premier observatoire des temps modernes sur l'île de Ven et inspirateur d'Hamlet. Par les mots et à travers les yeux d'un garçon rêveur, fils de la narratrice de L'enfant céleste, Maud Simonnot revisite son ancienne passion pour les astres et les plantes, et cette partie du monde où elle a habité pendant deux ans. « J'avais suivi mon mari à l'époque en poste en Norvège et j'y suis devenue l'"attachée à la littérature" de l'ambassade de France à Oslo, par hasard en discutant avec un des lecteurs de la bibliothèque du centre culturel français - son directeur, fan de Barbara comme moi. Il a créé le poste pour moi. »

Par hasard ? Par chance ? Maud Simonnot avoue qu'elle en a eu pas mal dans sa vie. Même les ruptures se transforment en belles histoires. Son roman est le voyage d'une mère échappant avec son fils à la pesanteur du réel : douleur de la séparation pour la femme quittée et carcan d'un système éducatif ne laissant aucune place à la poésie enfantine. Cette écriture de l'intime dépeignant corps et âme a-t-elle été difficile ? Pas toujours évident pour une discrète de nature, mais, « quand on écrit, il faut assumer l'impudeur. » Quant à trouver un éditeur quand on est soi-même éditrice, certes on n'est pas inconnue du milieu, mais là encore il faut balayer scrupules et paranoïa quant aux éventuelles accusations de connivence. On écrit pour soi, pour son fils. Et puis cette maison d'édition nommée L'Observatoire, n'était-ce pas un signe ?

Maud Simonnot
L'enfant céleste
Editions de l’Observatoire
Tirage: 3 800 ex.
Prix: 17 euros
ISBN: 9791032913697

En dates

1979

Naissance en Côte d'Or. Etudes à Dijon et à Paris. Thèse en histoire de l'édition sous la direction de Jean-Yves Mollier.

2002

Stage chez P.O.L.

2005

Premier poste dans l'édition au Mercure de France.

2008

Attachée à la littérature à l'ambassade de France en Norvège. Découvre l'île de Ven.

2011

Editrice auprès de Teresa Cremisi chez Flammarion.

2017

Premier livre « La nuit pour adresse » (prix Valery Larbaud). Intégration au comité de lecture de la « NRF ».

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