La collection L ’Imaginaire vient de rééditer Sortilèges , de Michel de Ghelderode. Un recueil de contes fantastiques que j’aurais dû lire depuis longtemps. Il avait déjà été proposé dans la collection Espace Nord de Labor il y a sept ans. En fait, je suis un peu déçu. Ce n’est pas tout à fait le chef-d’œuvre que j’espérais. Peu importe. D’ouvrir ce volume à la présentation sobre m’a donné une bouffée de nostalgie douce, celle qu’on éprouve – que j’éprouve, au moins – pour des volumes anciens et poussiéreux côtoyés longtemps, tenus à portée de main avec la promesse d’y entrer un de ces jours – promesse non tenue, dans ce cas-ci, mais peu importe aussi. Ces volumes anciens auxquels je pense tout à coup peuplaient la cave d’une maison de maître, avenue de Tervueren, à Bruxelles. Les Editions Marabout y avaient installé leurs bureaux et cela leur allait bien. La bâtisse avait un passé – j’ai rencontré depuis, à Madagascar, curieux détour, quelqu’un qui y avait passé son enfance. La maison d’édition aussi, et son passé était tout entier remisé dans cette cave où personne ne descendait jamais. Sauf moi. J’aimais y fouiner. Il n’y avait pas abondance de découvertes à y faire. Quelques-unes quand même. Je me souviens d’y avoir trouvé un gros paquet de feuilles couvertes au stylobille d’une écriture anguleuse : le brouillon d’une traduction de Dostoïevski par Adamov. Qu’est-ce que c’est devenu ? Que sont devenues, aussi, les collections des nombreux titres publiés par Marabout depuis les débuts dans les années quarante ? Il devait y avoir là, trois fois, Sortilèges . Le recueil avait été d’abord le n° 302 de Marabout collection , sorti en 1962, l’année même de la mort de Ghelderode ( « alors qu’il est pressenti pour le prix Nobel de littérature » , signale L’Imaginaire ). La couverture apparaît aujourd’hui comme une horreur. Mais elle appartient à son époque, comme celle du même livre repris trois ans plus tard dans la collection Marabout Géant , avec cette mention supplémentaire : « Son chef-d’œuvre ! » Le chef-d’œuvre en question (vous savez ce que j’en pense) sera mis une troisième fois au catalogue en 1974, cette fois dans la série fantastique de la Bibliothèque Marabout (et, j’imagine, à l’initiative de Jean-Baptiste Baronian qui devait être alors directeur littéraire, laissant s’exprimer son goût pour la littérature fantastique). Plus tard, comme on le sait, Marabout s’est éloigné de la littérature. Mais ces volumes fragiles, imprimés souvent sur du papier de mauvaise qualité, se trouvent encore chez les bouquinistes et sur les sites marchands. Avis aux nostalgiques…
15.10 2013

Les dernières
actualités