Avant-critique Récit

Pauline Dreyfus, "Ma vie avec Colette" (Gallimard)

Pauline Dreyfus - Photo © Francesca Mantovani/Gallimard

Pauline Dreyfus, "Ma vie avec Colette" (Gallimard)

Après avoir convoqué les figures de Paul Morand, Robert Badinter et Valéry Giscard d'Estaing, Pauline Dreyfus chemine aux côtés de Colette.

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Par Laëtitia Favro,
Créé le 23.05.2023 à 09h00 ,
Mis à jour le 01.06.2023 à 17h09

L'amie prodigieuse. Il y a 150 ans naissait Sidonie-Gabrielle Colette, connue sous le nom de plume de Colette. Un anniversaire propice à la redécouverte de son œuvre - et c'est heureux -, une œuvre qui n'échappe cependant pas aux tentatives de récupération - dommage collatéral des célébrations de tout centenaire. Ce n'est pas le cas ici. Dans Ma vie avec Colette, Pauline Dreyfus ne se contente pas de tisser des correspondances entre elle et la compagne d'une vie, ni de dérouler le fil d'une existence à l'aune des textes qui lui ont survécu, mais raconte, fidèle au travail biographique déjà accompli avec Paul Morand ou Robert Badinter, une Colette rendue à elle-même, dépouillée des idées reçues. Sa lecture s'éloigne par ailleurs ou prend le contre-pied de ce que notre époque aimerait lui faire dire : non, Colette n'était pas féministe, se moquait bien de la politique et était sans doute « la personne la moins sentimentale du monde ».

Comme beaucoup, Pauline Dreyfus la rencontre dans Claudine à l'école à un âge qui ne lui permettait pas de comprendre la dimension grivoise de ce premier ouvrage que Colette rédige avec Willy, son premier époux. Apercevant depuis les fenêtres de la classe un beau ciel bleu, l'écrivaine alors enfant éprouve de semblables « démangeaisons de nature » que son amie de papier. « Aimer les livres de Colette, c'est avant tout aimer les plantes, s'attendrir sur les bêtes et, souvent, moquer les faiblesses des hommes. » Des premières années bourguignonnes dans la maison de Saint-Sauveur à la réclusion parisienne des vieux jours, Colette invite à s'extasier devant le miracle offert par la nature, un miracle indissociable du paradis perdu de l'enfance, second leitmotiv que souligne ce récit. « Elle a porté la nostalgie de l'âge tendre à son point d'incandescence », écrit Pauline Dreyfus qui connaîtra également la nostalgie liée à la vente d'une maison de famille. Cheminant au gré des écrits de Colette, des études qui leur ont été consacrées et de souvenirs ravivés qui, en écho, réveillent ceux du lecteur, ce court texte s'inscrit dans la collection « Ma vie avec » dirigée chez Gallimard par l'académicien François Sureau, collection qui, au lieu de notes et d'un appareil critique, privilégie un compagnonnage intime, une flânerie littéraire inspirée autant qu'éclairante.

Pauline Dreyfus
Ma vie avec Colette
Gallimard
Tirage: 4 000 ex.
Prix: 17,50 € ; 160 p.
ISBN: 9782072990809

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