avant-portrait > Clara Arnaud

Clara Arnaud est une fille brave sans s’en donner l’air. Derrière une voix douce, un débit posé, elle affiche un CV d’aventurière : 30 ans à peine et des milliers de kilomètres parcourus en solo, à travers des contrées parmi les moins denses et les plus excentrées de la planète. Et désormais trois livres à son actif, deux récits et un roman, tous inspirés de sa vie voyageuse. Mais aucune esbroufe, aucune posture matamore ni à l’écrit, ni à l’oral chez cette jeune femme qui vit et travaille depuis septembre au Honduras, recrutée pour des missions de développement et de coopération par l’ambassade de France.

Le même type de contrat polyvalent l’avait déjà conduite au Sénégal, au Bénin, au Ghana et en République démocratique du Congo où elle a vécu deux ans, basée à Kinshasa dont elle a fait l’un des personnages de son premier roman L’orage. Mais l’écriture est venue d’un voyage fondateur il y a déjà presque dix ans : entre février et août 2008, après une année de préparation où elle s’est notamment formée à la maréchalerie, Clara Arnaud a parcouru le grand ouest chinois, des monts Célestes au plateau tibétain, avec pour seuls compagnons deux chevaux de bât. De cette équipée équestre à travers les vastes espaces désertiques de l’Extrême-Orient, l’ancienne étudiante en géographie et en chinois à Paris-1, titulaire d’un master de Science po, a tiré Sur les chemins de Chine (Gaïa, 2010), un premier récit qu’elle n’aurait pas imaginé publier si un membre de la fondation Zellidja, qui finance les projets de très jeunes voyageurs et dont elle avait obtenu une bourse, ne l’avait pas transmis aux éditrices de Gaïa.

Baroudeuse

D’emblée au cœur de la démarche, écrire pour restituer son impressionnante aventure a été aussi pendant le temps du voyage un recours contre la solitude. Et les récits de cette cavalière éprise d’échappées libres depuis l’enfance qui, dès 11 ans, faisait ses premières balades seule sur le dos de la mule familiale dans la forêt jouxtant la maison de ses parents en Seine-et-Marne, assument un regard subjectif, plus attentif à la poésie des lieux et des rencontres qu’à la géopolitique.

"Voyager ne sert à rien", affirme-t-elle en préambule dans Au détour du Caucase, sous-titré Conversation avec un cheval, qui raconte un périple de deux mois en Arménie et en Géorgie durant l’été 2016, où elle réfléchit avec beaucoup de recul et d’acuité à ce que voyager veut dire et observe la baroudeuse moins idéaliste qu’elle est devenue. Elle dit que ce livre est arrivé comme ce voyage, sans préméditation. "C’était assez simple et joyeux, moins préparé." "J’en attendais moins. Du coup, j’ai pris les choses comme elles venaient. J’étais peut-être moins dans le défi et le fantasme qu’à 20 ans." Elle a malgré tout éprouvé la déception de rentrer trop tôt, contrainte de s’envoler très vite vers son nouveau poste, vers un continent latino-américain où elle n’avait encore jamais mis les pieds. De là-bas elle travaille sur un nouveau livre, un roman localisé dans une ville fictive. La voyageuse est devenue écrivaine.

Véronique Rossignol

Clara Arnaud, Au détour du Caucase. Conversation avec un cheval, Gaïa. 20 euros, 224 p. Sortie : 7 juin. ISBN : 978-2-84720-770-5

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