Enquête

Certains genres sont plus propices au sourire que d'autres, comme le roman feel-good, qui se donne précisément cet objectif. Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire de Jonas Jonasson (Presses de la Cité), Mémé dans les orties d'Aurélie Valognes (Le Livre de Poche), Tenir debout de Mélissa Da Costa (Albin Michel), Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates de Mary Ann Shaffer (éditions Nil...) ont très bien fonctionné en librairie.

Qui dit humour, dit aussi... développement personnel. Car même quand il se veut sérieux, un essai de coaching peut être lu au second degré tant il multiplie les clichés, comme s'en amuse Frédéric Ciriez dans Je suis capable de tout (Verticales). D'autres ouvrages s'amusent du genre et en prennent le contrepied en assumant le rocambolesque des situations, comme, en vrac, des manuels livrant les clés pour gagner l'amour de son chat, Achète-toi toi-même ces p*tains de fleurs de Tara Schuster (Jouvence), ou encore Comment ne pas devenir un vieux con de Sophie-Marie Larrouy et Mademoiselle Navie (Marabout).

Humour et transgression

En jeunesse, avec par exemple Marie-Aude Murail ou Goscinny et ses Vacances du Petit Nicolas..., l'humour joue un rôle particulier : il peut enseigner la transgression. Comme argumente Loreto Nùñez, directrice de l'ISJM Suisse Romande, qui œuvre à la promotion de la littérature jeunesse et de la lecture : " L'humour est une transgression qui permet d'avancer, de comprendre. Notamment l'absurde : le monde peut différer de ce que l'on te dit. C'est encore plus drôle dans une lecture à voix haute, qui permet de partager le texte avec l'adulte habituellement en situation de pouvoir. Le scatologique met par exemple les adultes mal à l'aise, ce qui fait encore plus rire son enfant. La transgression passe aussi par les jeux de mots, qui revisitent la langue, et c'est une façon ludique de l'apprendre et de faire aimer la lecture ", développe-t-elle.

Aussi, les éditeurs jouent-ils le jeu. " En jeunesse, pour nous, la fantaisie et la légèreté sont essentielles. On voudrait que ces premières lectures soient d'abord enthousiasmantes ", soutient Olivier Bron, fondateur des éditions 2042 (ex-2024). On pense à La question qui tue (400 coups), où les auteurs Jean Leroy et Olivier Dutto mettent en scène une fille interrogeant son grand-père sur la mort. " Ils rappellent que la vie continue de tourner, et la vie est remplie d'humour. C'est parler de la mort avec humanité, tendresse et délicatesse ", analyse l'éditeur Renaud Plante. Dans Try again (qui paraîtra à l'automne aux éditions Thierry Magnier), roman pour adolescents d'Insa Sané, deux garçons veulent coucher pour la première fois. Et pour aborder cet important sujet, le personnage principal est un préservatif perdant patience dans une poche.

Et la BD, historiquement dédiée aux enfants, a gardé cette tradition de l'humour. Les anachronismes des Astérix, l'intelligence des strips de Bill Watterson pour Calvin et Hobbes, les satires de Voutch, l'humour tendre de Dominique Roques et Alexis Dormal dans Pico Bogue, la subversive Lisa Mandel, l'absurdité minimaliste d'Anouk Ricard, les parodies de Fabcaro, qui pousse à l'extrême des situations pour en prélever la sève dans toute sa pureté... Un format qui offre sans doute le plus beau panorama des traits d'esprits humains. D'une richesse guacamolesque.

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