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Read Barcelona, alternative aux foires internationales et lieu d’échanges et d’innovation

L’ancienne prison La Model, à Barcelone, a accueilli la première édition de Read du 17 au 19 septembre 2025 - Photo Olivia Snaije

Read Barcelona, alternative aux foires internationales et lieu d’échanges et d’innovation

La première édition de Read Barcelona s’est achevée le 19 septembre après trois journées d’échanges professionnels et des forums publics dans la soirée. Près de 200 éditeurs internationaux étaient présents, dont 90 ont bénéficié d’aides pour leur voyage et/ou leur hébergement.

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Par Olivia Snaije
Créé le 22.09.2025 à 16h10

Au lendemain de sa première édition, Read Barcelona apparaît comme un pari réussi pour de nombreux éditeurs : selon un constat largement partagé par les participants, les salons traditionnels comme ceux de Francfort ou de Londres, souvent trop imposants, ne sont pas toujours rentables pour les petites structures indépendantes. Ces dernières peinent à y rencontrer des partenaires internationaux dont les catalogues correspondent à leurs besoins en matière d’échanges de droits.

De leur côté, les éditeurs en sciences sociales, qu’ils travaillent dans de petites ou de grandes structures, expriment une volonté commune de découvrir de nouvelles voix de la pensée critique, parfois invisibilisés dans les salons plus commerciaux.

Contre la « grande uniformisation des catalogues »

Ces observations ne font que renforcer la raison d’être de Read, un projet dont l’idée a émergé il y a une dizaine d’années entre les éditeurs Sebastian Budgen de Verso Books (Royaume Uni), Stella Magliani-Belkacem de La Fabrique (France) ou Simón Vázquez de Verso Libros (Catalogne-Espagne), rejoint au fil des ans par Ole Rauch de Brumaire Verlag (Allemagne) et les revues Jacobin Magazin et Surplus Magazin.

Conférence sur le féminisme et le néolibéralisme autoritaire à Read Barcelone
Conférence sur le féminisme et le néolibéralisme autoritaire à Read Barcelone- Photo OLIVIA SNAIJE

Face à ce qu’ils qualifient de « grande uniformisation des catalogues », les organisateurs ont tenu à intégrer des revues comme la New Left Review (Royaume-Uni) ou la Review of African Political Economy (Royaume-Unis/Afrique). « Ces magazines peuvent être de véritables viviers d’auteurs et d’autrices », souligne Stella Magliani-Belkacem. L’éditrice, dont l’emploi du temps était rythmé par des rendez-vous toutes les demi-heures, a également animé un débat public sur le féminisme à l’ère du néolibéralisme autoritaire. Elle y était accompagnée de trois de ses autrices : Françoise Vergès, Clara Serra et Elsa Deck-Marsault. L’événement a attiré près de 400 participants.

« Le format classique des foires s’essouffle »

Simón Vázquez a réussi à obtenir le financement de Read grâce au soutien du gouvernement autonome de Catalogne et de la ville de Barcelone. Cette dernière a mis à disposition un lieu emblématique : l’ancienne prison La Model, ouverte en 1904 et définitivement fermée en 2017. Des fondations, comme la Rosa Luxemburg Stiftung, ont complété le budget.
En mobilisant leurs réseaux internationaux, les organisateurs ont pu rassembler des maisons d’édition « dont les catalogues offrent une grande qualité et diversité de penseurs critiques », a souligné Simón Vázquez.

Stella Magliani-Belkacem et son autrice Françoise Vergès
Stella Magliani-Belkacem (La Fabrique) et son autrice Françoise Vergès- Photo OLIVIA SNAIJE

Alexandre Sanchez, responsable en Europe du pôle éditorial et de la direction commerciale chez Lux Éditeur (Québec), se réjouit de cette initiative. « Le format classique des foires s’essouffle », estime-t-elle. Pour elle, Read arrive à un moment « charnière » dans son catalogue : « Nous cherchons à jongler entre une génération et une autre, à faire entendre de nouvelles voix, notamment celles du Sud global. C’est l’endroit idéal pour cela. On assiste à la naissance de quelque chose qui va se pérenniser. »

Alejandro Ferrer, éditeur Aux Forges de Vulcain (France) souligne que sa maison, déjà dans « le partage et l’artisanat de l’édition », se veut plus politiquement engagée. « Cet espace nous permet de voir ce qui se fait en Europe et ailleurs, d’échanger des idées et de voir quelles maisons produisent des romans politiques. »

Maisons militantes et grands éditeurs

Seule agence littéraire présente, BAM (France), représentait ses maisons indépendantes francophones, Les Liens qui Libèrent, Le Passager clandestin et Héliotrope. « Certaines maisons qu’on voit ici seraient noyées dans d’autres foires où je n’aurais pas forcément le temps de les voir », explique Julián Nossa, agent littéraire chez BAM. « Pour rentabiliser le déplacement à Francfort, je dois privilégier les titres plus commerciaux de mon catalogue », précise-t-il.

Loin d’être un évènement réservé aux petites maisons militantes : Christian Heilbronn de Suhrkamp Verlag, Manasi Subramaniam de Penguin Random House India et Sophie Kucoyanis, secrétaire générale des sciences humaines chez Gallimard, étaient également présents.

« Nous partageons un même constat, commente Sophie Kucoyanis. L’Europe est exposée à une guerre, un génocide est en cours, et l’extrême droite est aux portes de toutes les démocraties. Le sud global a du mal à venir chez nous et le centre du monde s’est déplacé. » Pour elle la réflexion est aujourd’hui essentielle : « Le livre un lien de partage pour approfondir cette réflexion. »

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