7 avril > Jeunesse Espagne > Enrique Quevedo

Rideaux frémissants, parquets grinçants, ombres remuantes… Depuis la nuit des temps, l’enfant a peur du noir et des monstres qui le peuplent. Historiquement incompatibles, les deux espèces vont enfin cohabiter en toute sérénité grâce à cet album qui prodigue des conseils à l’une comme à l’autre. Si, au moment de s’endormir, l’enfant aperçoit sur le mur d’en face un passage vers d’autres mondes, il a intérêt à se glisser davantage sous la couverture. Cachette on ne peut plus sûre puisque les monstres sont allergiques aux acariens qui prospèrent dans la literie. Derrière leurs cloisons, ces créatures s’ennuient et mènent des vies bien monotones, voilà pourquoi leur passe-temps favori est de souffler sur les bougies des enfants qui passent dans les corridors. La solution s’impose : se munir de préférence d’une torche électrique. Si, en prenant son bain hebdomadaire, l’enfant voit débouler un monstre des égouts avec sa serviette sur l’épaule, aucune hésitation : qu’il fasse ses ablutions à un autre moment que le dimanche, jour rituel du bain monstrueux. Les conseils prodigués aux affreuses chimères sont tout aussi avisés : si l’une d’elle est dans un parc et qu’elle est assaillie par une ribambelle de gamins alors qu’elle voulait se la couler douce, il lui est recommandé de prendre la pose comme statue et d’attendre le départ des émeutiers. Quand son apparence l’empêche de se faire des amis, hélas, il va falloir qu’elle patiente jusqu’à Halloween pour passer inaperçue…

Entre rêve et réalité, tout en ombre et en lumière, cet album dédié aux enfants et à leurs ennemis ataviques est signé par l’illustrateur sévillan Enrique Quevedo. Son dessin à la plume noire, fabuleusement délicat et précis, est un hommage à Edward Gorey et à Maurice Sendak. L’Espagnol se dit "fasciné par les mécanismes qui ne fonctionnent pas, ont fonctionné et fonctionneront de nouveau", une déclaration qui nous le fait aimer d’emblée ! De toutes les superbes pages de son livre, on préfère la dernière : il est un lieu ultime où l’enfant affronte toutes les peurs et les émotions du monde. Ce lieu, il le tient entre les mains. Cela s’appelle un livre. Fabienne Jacob

 

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