9 février > Nouvelles Suisse > Noëlle Revaz

Dans le portrait que nous avions fait de Noëlle Revaz (LH 1000, du 30.5.2014, p. 74.), à la sortie de L’infini livre (Zoé), son troisième roman après Rapport aux bêtes (2002) et Efina (2009), la très singulière écrivaine suisse expliquait qu’elle cherchait pour chaque histoire une forme différente adaptée. Et que, depuis toujours, écrire des nouvelles était pour elle comme "un laboratoire" où elle expérimentait toutes sortes de styles.

Les vingt-neuf textes regroupés ici, des monologues pour la plupart - certains écrits pour la radio ou le théâtre, comme Quand mamie ("MiniZoé", 2011) -, montrent bien la très grande variété de voix qui peuplent son imaginaire : des hommes et des femmes de tous âges, des enfants des deux sexes. Des "je", des "on", des "nous" faussement solennels comme dans "Discours en trois parties aux amants et aux amoureux transis" sur un ton d’apostrophe-mise au point.

Hermine blanche qui donne son titre au recueil est la seule nouvelle qui prenne clairement la forme d’un conte. C’est l’histoire d’une fille dont l’esprit s’absente du corps, les jours de neige en particulier, et va parcourir la campagne. On retrouve souvent, notamment dans "Mes nuits au ciel", ce motif de l’évasion, cette faculté de s’abstraire mentalement du monde, de le survoler, de mettre à distance une violence sourde, parfois tapie dans un hors-champ menaçant. Noëlle Revaz explore les liens un peu tordus ("Sous les couvertures"), les couples bizarres, les malentendus, cette incompréhension foncière de l’autre qu’aucune intimité, aucune proximité physique ou promiscuité ("L’amour à la Cité") ne parvient jamais à dissiper. Mais cette capacité de détachement est aussi souvent un refuge reposant. Une pratique d’affranchissement, un exercice de liberté. "Devant moi s’ouvraient de grands espaces", constate dans "Laurent" la narratrice qui raconte la relation sans engagement, et pourtant parfaitement confortable, qu’elle a entretenue avec un séducteur qui prenait les femmes pour des objets. "On peut ressentir le besoin, à certains moments dans une vie, de n’exister pour personne et de n’avoir rien à donner. De n’avoir rien à dire ou à faire, simplement profiter de ce que l’observant ne sait pas qu’il est observé." V. R.

 

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