Roman/Japon 22 août Inaba Mayumi

Paru en 1992 au Japon, ce roman d'Inaba Mayumi (1950-2014) est l'un de ses plus sombres. Fondé sur une histoire authentique, le livre raconte, à la première personne, la descente aux enfers d'un couple : Suzuki Izumi, écrivain en devenir, dont la carrière littéraire s'impose peu à peu, et Abe Kaoru, saxophoniste de free-jazz dont le rêve va se briser en plein vol.

En 1986, soit treize ans après leur rencontre, quand ils avaient 24 ans, et douze ans après la mort du garçon, d'une overdose de médicaments, elle se souvient encore de lui, et, se décidant à écrire sur lui, c'est aussi sur elle-même qu'elle va écrire, mentionnant à peine leur fille, qu'elle appelle toujours « l'enfant ».

Née dans une famille déclassée, que le père, journaliste au chômage, n'arrivait plus à faire vivre décemment, Izumi s'est toujours droguée, et a mené une vie de débauche. Un temps actrice porno, elle a connu de nombreux garçons, été plusieurs fois enceinte, et a autant de fois avorté. En 1973, elle se remettait de sa rupture avec le beau Yô, le barman de chez Anny, spot du quartier de Shinjuku, repaire de la jeunesse tokyoïte pop de l'époque. C'est alors qu'un petit matin, dans un parc, défoncée, elle rencontre, ivre mort, Kaoru, un ancien voyou maladif, malheureux, fauché, « verdâtre », devenu saxophoniste de jazz, mais qui ne fait pas carrière à cause de sa violence, de son comportement erratique, de ses addictions. Son côté « jeune délinquant » la séduit. Elle le ramène chez elle, il s'installe et ne la quittera plus que pour mourir. « Je suis collant », lui dit-il, avant de devenir un mari possessif, malade de jalousie.

Leur relation, cocktail délétère d'amour fou autant que de haine, va se transformer en une spirale autodestructrice, où Kaoru, qui finira en hôpital psychiatrique, attire dangereusement sa jeune femme. Un jour, en pleine crise, elle se tranche le petit doigt de pied, en gage d'appartenance, de fidélité totale. Tout cela ne pouvait que mal se terminer. Mais heureusement pour elle, elle a la littérature, où elle se fait une place reconnue. Quant au pauvre Kaoru, la musique ne suffira pas à l'empêcher de basculer. Après leur divorce, il revient chez elle, et se suicide aux barbituriques. Elle en concevra un sentiment de délivrance, et de liberté retrouvée, avant de traverser une phase de remords et de paranoïa. Un moment, elle perd le goût d'écrire des livres, vit grâce au journalisme. Puis il y aura cetteValse sans fin, en guise de rédemption.

Mayumi Inaba
La valse sans fin - Traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu
Philippe Picquier
Tirage: 3 500 ex.
Prix: 14 euros ; 144 p.
ISBN: 9782809714326

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