Roman/France 15 août François Garde

Haut fonctionnaire, magistrat, François Garde s'est forgé, en quelques romans et récits, la réputation d'un écrivain hauturier, amateur d'histoires exceptionnelles. C'est ce qui relie sans doute son nouvel opus, Roi par effraction, bien différent en apparence, au reste de son œuvre, outre son érudition, son talent de conteur et sa maîtrise parfaite d'une construction romanesque.

L'auteur s'est attaché aux six derniers jours de la vie de Joachim Murat, né en 1767 dans un petit village du Quercy où son père était aubergiste, mort le 13 octobre 1815 dans la forteresse de Pizzo, en Calabre, où il avait débarqué quelques jours auparavant, en provenance de Corse, ô ironie, afin de reconquérir son éphémère royaume de Naples, sur lequel il avait « régné » à peine cinq ans. Pour ce faire, pâle réplique du débarquement triomphal de Golfe Juan où son maître, Napoléon, avait été acclamé par la population, Murat avait dérivé, accosté loin de sa capitale, avec 46 mercenaires dépenaillés et lâches, et avait été aussitôt arrêté.

Tandis que l'Empereur déchu faisait voile vers sa dernière demeure de Sainte-Hélène, le roi d'opérette - Napoléon avait récompensé sa bravoure, fait reine sa sœur Caroline dont Joachim était l'époux, mais c'est lui qui n'avait cessé de tout régenter -, lui se morfondait dans sa cellule, seul, abandonné de tous, certain d'une seule chose, c'est qu'il allait être exécuté. Pas plus que Napoléon ne lui avait pardonné sa trahison, puis son ralliement à Louis XVIII en 1814 - il l'a « mis au placard » durant les Cent-Jours, se privant, à tort, de son exceptionnelle furia de hussard capable de galvaniser ses troupes et de faire basculer le sort d'une bataille -, les Autrichiens ne lui ont pardonné de les avoir également trahis, en 1815, ralliant « l'Usurpateur » après avoir traité avec eux en secret afin de conserver son royaume, voire d'unifier toute l'Italie sous sa botte.

Murat était aussi bon soldat que piètre politique, et tout cela méritait sans doute les douze balles dans la peau qu'il reçut, bravement, le 13 octobre 1815. Ses restes reposent sous une dalle dans la modeste église de Pizzo, alors que d'autres maréchaux d'Empire ont des sépultures somptueuses au Panthéon ou aux Invalides. Pas lui, le mal-aimé de l'Empereur, mais quel perdant magnifique, quel personnage attachant, dont François Garde, mêlant savamment histoire et invention, a fait un héros de roman qu'Alexandre Dumas, dont Murat croise à un moment le père, général mulâtre, n'aurait pas renié.

François Garde
Roi par effraction
Gallimard
Tirage: NC
Prix: 19 euros ; 244 p.
ISBN: 9782072850158

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